Editeur: Piranha – 2017 (416 pages)
Lu en octobre 2017
Mon avis: Sur les hauteurs célestes de Benimidori, petite ville au bord de la mer du Japon à quelques centaines de kilomètres à l’ouest de Tokyo, trône l’immense résidence de la famille Akakuchiba. Installés dans cette région du San’in depuis des temps immémoriaux, les ancêtres de cette dynastie mythique sont connus et reconnus pour leur savoir-faire de forgerons. Prenant leur essor après la deuxième guerre mondiale lorsque la sidérurgie se développe à une échelle industrielle, ces maîtres du feu et de l’acier renoncent alors aux bas-fourneaux artisanaux des origines pour construire une énorme usine équipée d’un haut-fourneau. Le développement technologique améliore la productivité et apporte la prospérité, non seulement au clan Akakuchiba, mais à toute la ville, et il n’y a pas de plus grande fierté en ce bas-monde que celle d’être ouvrier aux Aciéries. Et qu’importe si le ciel est plombé en permanence par les fumées noires, et les maisons et les poumons des métallurgistes tapissés de poussières toxiques.
C’est au milieu de cette époque dorée que nous entrons dans la famille Akakuchiba. Toko, la dernière de la lignée, âgée d’une petite trentaine d’années, nous raconte l’histoire de sa grand-mère, de sa mère, et la sienne. Trois femmes très différentes, dont la vie est indissociable de celle des Aciéries. Le destin de la douce Manyo, la grand-mère, tient du conte de fées : abandonnée à l’âge de trois ans par « Ceux des Confins », une tribu montagnarde nomade, elle est adoptée par un brave couple d’ouvriers qui l’élèveront comme leur fille. Dotée d’un don de voyance, pauvre et illettrée (pour son plus grand malheur), elle est cependant choisie par la matriarche des Akakuchiba pour épouser l’héritier de l’empire familial. Celui de la flamboyante et rebelle Kemari, fille de Manyo et mère de Toko, n’est pas moins extraordinaire : cheffe d’un gang de loubardes à moto à l’adolescence, elle deviendra plus tard une célèbre auteure de mangas, dont la réussite financière permettra de maintenir les Aciéries à flot lors du déclin de l’industrie sidérurgique. Quant à Toko, un peu falote et apathique, elle incarne bien sa génération, paumée et désabusée, ne sachant que faire de sa vie, au moment où le haut-fourneau, éteint depuis des années, est sur le point d’être démoli.
Cette saga familiale, entre croyances rituelles et modernité, aux personnages attachants, raconte les difficultés d’adaptation de ceux-ci, tant dans leur vie personnelle et affective que professionnelle, à l’évolution des modes de pensée et de la situation économique du Japon, faites d’allers-retours de l’euphorie au pessimisme, au gré de l’essor industriel et de son déclin, de la bulle immobilière et de son éclatement, de la perception du rôle de la famille, de la femme, des études, du travail.
Malgré quelques longueurs et une troisième partie plus faible (celle sur la vie de Toko), voici une histoire agréable à lire, un brin nostalgique, non dénuée d’humour et teintée d’une sorte de réalisme magique à la japonaise, écrite dans un style fluide, parfois poétique, parfois plus terre à terre. Dépaysement assuré.
En partenariat avec les éditions Piranha, via le réseau NetGalley.
Présentation par l’éditeur:
À travers l’histoire de trois générations de femmes japonaises, Kazuki Sakuraba livre une saga familiale empreinte de réalisme magique, entre tradition et modernité.
Lorsqu’une fillette est retrouvée abandonnée dans la petite ville japonaise de Benimidori en cet été 1943, les villageois sont loin de s’imaginer qu’elle intégrera un jour l’illustre clan Akakuchiba et règnera en matriarche sur cette dynastie d’industriels de l’acier. C’est sa petite-fille, Toko, qui entreprend bien plus tard de nous raconter le destin hors du commun de sa famille. L’histoire de sa grand-mère, femme dotée d’étonnants dons de voyance, et celle de sa propre mère, chef d’un gang de motards devenue une célèbre mangaka, dont le succès permettra de sauver la famille du déclin dans un Japon frappé de plein fouet par la crise de l’industrie industrielle.
Une saga familiale au pays du Soleil levant- je note !