vendredi , 13 juin 2025

Requiem pour une apache

Auteur: Gilles Marchand

Editeur: Aux Forges de Vulcain – 2020 (414 pages)/Points – 2022 (384 pages)

Lu en mars 2025

Mon avis: L’apache du titre, c’est Jolene, caissière de supermarché qui n’a pas grand-chose pour elle, et sûrement pas la chance. Née dans les années 50, dans un milieu défavorisé économiquement, socialement et culturellement, elle fait partie de la caste des invisibles de la société. Un jour, virée de son boulot, elle débarque dans le bar/hôtel/pension de famille tenu par le bon Jésus, patron philanthrope qui fait à peine payer ses clients (qui de toute façon n’en ont pas les moyens), ou alors qui demande un coup de main pour le ménage en échange du gîte et du couvert. Bien plus qu’un hôtel fonctionnel, son établissement est un refuge pour âmes en peine, déclassés, bras cassés, marginaux. C’est dans cette famille d’éclopés de la vie qu’atterrit Jolene. Elle ne tardera pas à s’y intégrer parfaitement, pour le meilleur et puis pour le pire.

Parce que le requiem du titre ne laisse pas beaucoup de doutes quant à une issue tragique.

Ce récit pour l’âme de Jolene est raconté par un pensionnaire de l’établissement, ex chanteur à succès de la décennie précédente, présentement ringardisé. Il décrit la vie de famille de la pension, l’arrivée de Jolene, leur envie à tous de vivre paisiblement, comment ce rêve vire au cauchemar à cause d’un employé du gaz malpoli, et comment l’auberge du bon Jésus se transforme en camp retranché inexpugnable, jusqu’à la fin, tragique, donc.

Que le manque de politesse susmentionné soit ressenti par les pensionnaires comme un énième affront méprisant, comme un manque de respect tout court justifiant une levée de boucliers et une résistance à ce qui/que représente la « société », oui certes, je ne dirai pas le contraire de cette société qui manque singulièrement de capacité à vivre ensemble et qui écrase le cortège de ceux qui en sont exclus, ou qui s’en excluent eux-mêmes faute de s’y adapter.

Tout cela n’est pas nouveau, et c’est très bien, utile, nécessaire, de rappeler les valeurs de solidarité, d’empathie, d’amitié, d’humanisme. Mais fallait-il pour autant diluer ce message sur plus de 400 pages (édition grand format) dans lesquelles il ne se passe pas grand-chose ? Avec un tel titre, je m’attendais à un coup d’éclat, voire un coup d’Etat, une révolution, une guerre entre cow-boys et Indiens. Mais le récit tient davantage de la galerie de portraits plus ou moins perchés (certes sympathiques et poétiques mais pas au point d’être attachants), que de la chronique haletante d’une révolution de mal-aimés. C’est trop manichéen et idéaliste. De Gilles Marchand, j’avais beaucoup aimé « Une bouche sans personne » et « Le soldat désaccordé ». A la fois plaintif et saturé de bons sentiments, ce titre-ci ressemble à du feel-good mélancolique, si un tel genre de romans existe.

Présentation par l’éditeur:

Jolene n’est pas la plus belle, pas la plus fine non plus. Et pas forcément la plus sympa. Mais lorsqu’elle arrive dans cet hôtel, elle est bien accueillie. Un hôtel ? Plutôt une pension qui aurait ouvert ses portes aux rebuts de la société : un couple d’anciens taulards qui n’a de cesse de ruminer ses exploits, un ancien catcheur qui n’a plus toute sa tête, une jeune homme simplet, une VRP qui pense que les encyclopédies sauveront le monde et un chanteur qui a glissé sur la voie savonneuse de la ringardisation.

Ce petit monde vivait des jours tranquilles jusqu’à ce que Jolene arrive. En quelques mois à peine, l’hôtel devient le centre de l’attention et le quartier général d’une révolte poétique, à l’issue incertaine.

Evaluation :

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