Auteur: Marie Nimier
Editeur: Folio – 1992 (256 pages)
Lu en 2013
Mon avis: Puisque le titre l’évoque, allons-y pour une petite dissection.
Si le chœur des Célestins est ici comparé à un corps humain, on pourrait dire que ses 80 choristes en constituent les membres, les organes, les muscles, reliés entre eux par des artères, des veines, des influx nerveux.
Le cœur, ce serait le chef de … chœur, en l’occurrence Thomas Morhange. Ce jeune chef passionné, arrivé aux Célestins presque par hasard, est investi d’une mission redoutable, qui repose sur ses épaules depuis deux générations : la création de la « Marche Funèbre pour la Mort d’un Nénuphar ». Cette œuvre, composée par son arrière-grand-père Alkan, a sombré au fond d’une malle poussiéreuse en même temps que son auteur, incompris à son époque, tombait dans l’oubli.
Et puis, il y aurait la tête, le cerveau, à savoir le couple Médard, lui administrateur à la poigne de fer, elle secrétaire rasant les murs comme une souris grise. Ce n’est pas pour rien qu’on la surnomme Raton.
Le récit s’ouvre sur le concert, mais revient bien vite sur l’anamnèse de l’année écoulée, entre répétitions de la Marche Funèbre et (més)aventures des protagonistes.
Car si le spectacle constitue une apothéose où le chœur, par Dieu sait quel prodige musical, chante d’une seule voix, transcendant les individualités et les différences, et les dissensions qu’elles provoquent, il aura fallu bien du mérite et de la persévérance pour surmonter les embûches. Parce qu’un chœur ne bat pas toujours à l’unisson, il est un corps d’humains avant tout, avec ce que cela implique de tiraillements, jalousies, tromperies, vachardises et chamailleries. Mais c’est surtout la tête du chœur qui est malade, car la palme du semeur de zizanie revient sans conteste à Médard, administrateur tyrannique ayant droit de vie et de mort sur ses recrues, un monstre de mesquinerie et un maître-chanteur (un comble, lui qui n’est même pas choriste). Tout au long du livre, le harcèlement qu’il inflige à ses victimes ira crescendo…
Faisant moi-même partie d’une chorale amateur, je m’attendais, après avoir lu la 4ème de couverture, à rire et à être émue. Eh bien… ce ne fut pas le cas. D’accord, certains passages m’ont fait sourire, et les portraits psychologiques sont assez fins. Mais quant à l’émotion, à part de la gêne et du dégoût, je n’ai rien ressenti. Je n’ai été touchée par aucun des personnages, aucune empathie, même envers cette pauvre Raton, qui en aurait pourtant bien eu besoin.
Je suis sans doute influencée par l’ambiance chaleureuse qui règne dans ma chorale, mais l’histoire des Célestins ne m’a pas semblée réaliste. Comment peut-on supporter un administrateur aussi pathologiquement dictatorial, comment peut-on chanter en se détendant (ou se détendre en chantant) dans une ambiance aussi délétère ? Je me serais enfuie en courant dès la 1ère répétition. Et puis ces histoires de cœur, voire plus bas sous la ceinture, je ne leur ai rien trouvé de croustillant ou d’émouvant, c’est même plutôt glauque.
Enfin, dernière fausse note : la présence d’un préadolescent qui n’a pas encore mué dans un chœur d’adultes est plutôt incongrue.
Bref, je ne suis pas arrivée à comprendre la ligne mélodique reliant les éléments de ce livre, trop de dissonances en empêchent l’harmonie.
A l’autopsie, cela ne vaut pas un requiem…
PS : Charles-Valentin Alkan, né Morhange, a réellement existé (1813-1888)
Présentation par l’éditeur:
Anatomie d’un chœur est l’histoire des rencontres, des conflits, des idylles entre quatre-vingts choristes qui s’aiment, se jalousent, se haïssent et pourtant ne feront qu’une seule voix le soir du concert.
L’intrigue épouse le rythme à trois temps des répétitions de la Marche funèbre pour la Mort d’un Nénuphar.
On découvre d’abord la figure passionnée du chef, Thomas Morhange, hanté par le désir de révéler au public l’œuvre de son arrière-grand-père, compositeur inspiré dont les contemporains ne retinrent que la fin pittoresque : il mourut écrasé par sa bibliothèque.
En contrepoint, l’univers chaotique des manigances de l’administrateur et de sa complice, plus intéressés par les bruits de couloir que par la musique.
Et surtout, un grand amour avec sa menue monnaie de compromissions, de chantages, mais aussi le timbre clair de ses fous rires, lorsque les lumières s’éteignent dans l’escalier et qu’il est impossible de résister.
Pour moi, c’est un bon souvenir de lecture.