Auteur: Rosa Montero
Editeur: Métailié (Suites) – 2017 (208 pages)
Lu en janvier 2017
Mon avis: Ce livre n’est pas un roman. Il est à la fois un récit autobiographique (mais pas forcément authentique) et un essai (mais bien loin d’une lourde démonstration scientifique) sur la littérature, l’écriture et l’imagination, cette « folle du logis », comme l’avait baptisée Sainte Thérèse d’Avila.
Rosa Montero nous embarque dans un texte jubilatoire et nous parle de la création littéraire, de sa raison d’être, du métier de romancier, des doutes et des peurs de celui-ci, au nombre desquels l’angoisse de ne pas être reconnu (par le public, les autres romanciers, la critique, séparément ou tous en même temps) fait figure de torture ultime. Ecrire contre le temps et la folie, pour apprendre et trouver du sens, dans la réalité ou la fiction, ou sur l’infime frontière entre les deux, écrire à partir de son imagination, qui se manifeste parfois à travers les rêves, ou à partir de la mémoire qui n’est pas toujours (consciemment ou non) fiable. Ecrire en toute indépendance vis-à-vis des critiques, du marketing, du pouvoir, ou s’y asservir. Ecrire pour vivre plusieurs vies, et finalement, pour ne pas mourir.
Dressant de-ci de-là de brefs portraits de quelques-uns de ses écrivains préférés, l’auteure ne se prive pas de dénoncer les attitudes peu honorables de certains autres, et nous livre des souvenirs de sa propre enfance et de sa vie amoureuse enflammée (mais rappelez-vous, la folle du logis à l’oeuvre dans la mémoire de Rosa Montero pourrait bien vous mystifier…)
Dans un style clair et fluide et avec un franc-parler jouissif, Rosa Montero fait un éloge passionné et passionnant de l’écriture et de l’imagination. A la fois instructif et amusant, ce texte enlevé et très personnel est un plaisir de lecture bien réel !
En partenariat avec les éditions Métailié.
Présentation par l’éditeur :
« L’imagination est la folle du logis. » (Sainte Thérèse d’Avila)
Rosa Montero invite le lecteur à un voyage entre vérité et fiction sous la houlette de la folle du logis, sur des chemins pleins de surprises, mêlant allègrement la littérature et la vie en un cocktail excitant de biographies d’écrivains et d’autobiographie vraie ou fausse.
A travers un panorama des folies et des faiblesses d’auteurs comme Melville, Goethe, Tolstoï ou M. Amis, ou bien des mécanismes de la passion amoureuse dont elle est elle-même la proie, elle bouscule le lecteur ravi. Elle lui propose une analyse des peurs et des névroses des romanciers, mêlée au récit des aventures et des tours cocasses que sa propre imagination lui a souvent joués. Loin de toute analyse universitaire, un livre sur l’imagination et les rêves, sur la folie et la passion, les peurs et les doutes des écrivains, mais aussi des lecteurs. Une défense et une illustration passionnées et jubilatoires de l’écriture, de la lecture et du rêve comme derniers remparts contre la folie.
Quelques citations:
« La rivalité entre frères […] n’existe pas seulement en littérature, la relation fraternelle est, je crois, le premier endroit où se mesurer: pour être moi, je dois d’une certaine manière l’être contre mes frères; ils sont mes autres moi possibles, des miroirs angoissants dans lesquels je me contemple. Je me dis au passage que cette sorte d’émiettement de la personnalité, ce manque de structuration du moi dont semblent souffrir actuellement certains adolescents est peut-être dû, entre autres, au fait qu’aujourd’hui beaucoup sont des enfants uniques et donc privés du reflet de cet autre moi possible, assez différent cependant pour lui permettre d’exister. »
« Il est vrai que des oeuvres atroces et d’une horrible facilité se vendent comme des petits pains en s’adressant à un public de lecteurs peu exigeants mais écrire un roman à la fois très mauvais et très populaire n’est pas à la portée du premier venu. Il faut pour cela avoir une certaine impudence ou être vraiment un peu simplet; il faut ne pas craindre de tricher, de flatter les bas instincts, et tout le monde ne sait pas le faire. J’ai l’impression que le bon écrivain ne peut que bien écrire, tout comme le mauvais n’est capable que d’écrire mal. Chacun écrit comme il peut car la littérature finit par devenir une fonction organique supplémentaire comme transpirer, par exemple, et on ne contrôle pas sa sueur: certains ruissellent au moindre effort tandis que d’autres restent parfaitement secs. »
« Je déteste la littérature utilitaire et militante, les romans féministes, écologistes, pacifistes et autres genres en iste; écrire pour faire passer un message trahit la fonction primordiale du roman, sa raison fondamentale, celle de la recherche du sens. On écrit pour apprendre, pour savoir, et on ne peut entreprendre ce voyage vers la connaissance si on emporte avec soi les réponses préalables. »
Si la fiction est mêlée à la réalité (je n’aime pas les témoignages, je le rappelle), alors je veux bien tester cet ouvrage personnel qui semble t’avoir complètement subjuguée !
Le « souci » dans ce livre est qu’on n’est jamais sûr de ce qui est vrai ou romancé dans les souvenirs de l’auteure…
Je vois passer cet ouvrage sur plusieurs blogs avec des commentaires élogieux. Bon, je le note mais ma PAL va encore s’écrouler !
Je décline toute responsabilité en cas de bosse à la tête causée par la chute d’un livre 😉