mardi , 3 décembre 2024

Tijuana Straits

Auteur: Kem Nunn

Editeur: 10/18 – 2012 (380 pages)

Prix du Meilleur polar étranger 2011 (magazine Lire)

Lu en 2013

tijuana straitsMon avis: C’est du noir, du pur et dur. Je ne vous parle pas de café ou de chocolat, mais de quelque chose de bien moins réconfortant : la vallée du fleuve Tijuana et son embouchure, à la frontière Mexique-US. Il y est bien question de nature, mais rien de bucolique : les usines américaines implantées côté mexicain empoisonnent d’abord leurs ouvriers avec les émanations chimiques de leurs produits, puis déversent leurs déchets toxiques dans la rivière sans le moindre état d’âme. Le principe du pollueur-payeur n’a pas cours ici. C’est pourtant le combat, le sacerdoce de Magdalena, jeune assistante juridique mexicaine. Ca, plus son bénévolat dans un foyer pour femmes battues. Voilà beaucoup de misère, de noirceur et de dangers pour de si frêles épaules. D’ailleurs Magdalena est victime d’une tentative de meurtre, et n’en réchappe qu’en s’enfuyant vers l’océan, où elle manque de se noyer. Finalement rejetée dans un sale état sur la plage, côté américain, elle est recueillie par Sam Fahey. Lui par contre n’a plus rien de jeune, ni de combattif. La quarantaine bien amortie, Sam la Mouette Fahey est une ancienne gloire du surf, reconverti, après un passage par la case prison pour trafic de drogue, en vermiculteur. Il vit seul avec son élevage de lombrics au fond de la vallée, dans une vieille ferme délabrée. Il survit, solitaire, taciturne, s’évadant dans la bière et le Valium, et dans ses souvenirs d’océan et de vagues mythiques dans la passe de Tijuana Straits.
Sam aidera Magdalena dans son combat écologiste, malgré une forte envie de préserver sa tranquillité si durement gagnée.
Vous vous en doutez, il y aura encore des vagues…
C’est donc du noir, et du tout bon. Pas de flics pour mener l’enquête, pas de rebondissements à toutes les pages, mais un certain suspense, et une plongée dans les bas-fonds de Tijuana, fabrique de criminels ultra-violents aux cerveaux ravagés.
Avec des personnages blessés par la vie, touchants, aux destins bouleversés et bouleversants, perdus au milieu des thèmes sombres de l’immigration clandestine, du capitalisme sauvage, de la drogue et des catastrophes écologiques, l’auteur nous laisse remonter à la surface et respirer quand il se met à parler de surf et de vagues avec poésie. C’est sûr, il connaît son sujet : l’océan, espace infini, de perdition ou de liberté…

Présentation par l’éditeur:

Tijuana Straits, frontière de la Californie et du Mexique. Côté pile, c’est le paradis des surfeurs ou Sam Fahey coule une vie solitaire. Côté face, c’est l’enfer des candidats à l’émigration, un no man’s land jonché de rêves brisés, où même la vie a un prix. Un prix que Sam réalise lorsqu’il recueille Magdalena, une activiste en lutte, prête à tout pour défendre ses idéaux… Avec Tijuana Straits, élu meilleur polar étranger 2011 par le magazine Lire, Kem Nunn a écrit non seulement un formidable thriller, mais surtout son plus beau roman.

Quelques citations:

– « Il était parti sans savoir ce qui l’avait amenée ici ni pourquoi elle semblait porter une certaine affection à Sam Fahey. Il s’était dit en partant et se redisait à nouveau que c’était drôle comme certains se sentaient attirés par cet homme…D’abord son coéquipier, et maintenant cette fille. Mais les épaves faisaient cet effet-là parfois. Il y avait des femmes, et des hommes aussi, qui n’étaient heureux que quand ils pouvaient se raccrocher à un être humain en perdition et veiller sur lui ».

– « Lascif n’est pas un terme que j’aurais pensé à associer à des vers, dit-elle.
– Les vers sont hermaphrodites. En théorie, ils devraient pouvoir s’autoféconder, mais, dans la réalité, ça ne semble pas se produire. Ils s’accouplent avec d’autres vers, ces petits saligauds romantiques ».

Evaluation :

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