Auteur: José Eduardo Agualusa
Editeur: Métailié – 2017 (240 pages)
Lu en mars 2017
Mon avis: Il y avait longtemps que je n’avais pas autant été induite en erreur par le titre d’un roman.
Avec ce « reine Ginga », je m’attendais à une biographie plus ou moins romancée de ce personnage historique (16è-17è siècles) qui dirigea une partie de l’Angola d’une main de fer, tenant tête aux tribus ennemies, aux Portugais et aux Hollandais, concluant des alliances opportunistes avec les uns ou les autres sans s’embarrasser de loyauté.
Si le début du roman se déroule effectivement à Luanda et est centré sur la reine Ginga et celui qu’elle a choisi pour secrétaire, à savoir Francisco José, jeune prêtre tout juste débarqué du Brésil, on glisse ensuite vers une narration axée sur les aventures mouvementées de celui-ci en Angola et au Brésil, et qui, dans les faits, officiera rarement comme secrétaire. Si la reine Ginga et ses passes d’armes resurgissent de temps à autre au cours du récit, ce thème devient cependant secondaire.
Bon, admettons, cette histoire de titre n’aurait pu être qu’un détail si par ailleurs la vie de ce jeune religieux avait été racontée de façon passionnante. Mais bof. Pourtant, ce n’est pas comme s’il ne lui arrivait rien, à Francisco José. En vrac : il a été menacé de mort, a dû s’enfuir, est tombé amoureux et a balancé sa soutane en même temps que sa foi, a été emprisonné, torturé, a traversé trois fois l’Atlantique, a dû frayer avec des Gitans, des Maures, des pirates, des Portugais et des Hollandais, est tombé malade, a failli mourir de faim et de soif, et a même été brûlé en effigie par l’Inquisition. Mais je me suis perdue dans toutes ces péripéties, de même que dans les relations sociales compliquées entre maîtres, esclaves, affranchis, domestiques libres, envahisseurs et envahis, métis, Indiens, Blancs, Noirs. Sans compter les arcanes des jeux d’alliances entre Portugal, Pays-Bas et Compagnie des Indes Occidentales, évoluant au gré des intérêts de chacun, argent et pouvoir étant, comme toujours, les nerfs de la guerre.
Quant à la deuxième partie du titre, elle se réfère à une citation de Ginga selon laquelle à l’avenir, l’Atlantique « sera une mer africaine. Le chemin par lequel les Africains inventeront le monde ». « Ont inventé » ou « inventeront », je chipote, toujours est-il que je n’ai pas compris où il était question de cette « invention » dans le livre.
Bref, ce récit est picaresque à souhait, avec guerres, passions, amours, haines et trahisons, mais j’ai trouvé qu’il manquait de profondeur. Les événements sont évoqués de manière presque documentaire, ou en tout cas trop distante, et ne suscitent guère d’émotions, alors qu’il y avait pourtant matière à tension dramatique.
Une lecture qui m’a largement échappé.
En partenariat avec les éditions Métailié.
Présentation par l’éditeur:
Francisco José, jeune prêtre brésilien, métis d’Indien et de Portugais, débarque à Luanda pour devenir le secrétaire de la reine Ginga, fille et soeur de rois, et reine elle-même.
Cette femme exceptionnelle (1581-1663) évinça les hommes de sa famille, s’empara de tous les attributs du pouvoir, se fit appeler « roi », entretint un harem d’hommes habillés en femmes et prit, les armes à la main, la tête de ses guerriers sur les champs de bataille. Fin stratège et diplomate, cruelle et séduisante, elle n’hésitait pas à s’allier à ses ennemis si nécessaire.
Le jeune héros brésilien, emporté par cette histoire tumultueuse, se trouve mêlé à la guerre de conquête des Hollandais et va d’aventure en aventure entre le Brésil et l’Afrique, sur les vaisseaux pirates.
José Eduardo Agualusa raconte une histoire véridique et étonnante dans un roman à la fois picaresque, vif, parfois poétique, plein de bruit et de fureur, d’amours interdites, de sang et de passion, de trahisons et de rebondissements palpitants. Dans un style magnifique il évoque aussi bien la cruauté de l’esclavage au Brésil que l’histoire dramatique de l’Afrique à travers le destin d’une très grande reine.
Quelques citations:
– Dans les jours anciens, ajouta-t-elle, les Africains regardaient la mer et ce qu’ils voyaient c’était la fin.
La mer était un mur, et non pas une route. A présent, les Africains regardent la mer et ils voient un chemin ouvert aux Portugais, mais qui leur est interdit.
Dans l’avenir, m’assura-t-elle, cette mer sera une mer africaine. Le chemin par lequel les Africains inventeront le monde.
– Cette nuit-là, dans le campement où nous passâmes la nuit, Domingos Vaz me raconta, avec une somme précieuse de détails, quelques-unes des cérémonies et des superstitions en usage chez les sauvages auxquelles il avait assisté. Je sentis, en l’écoutant, que je pénétrais au sein de l’Enfer et j’en fus rempli de terreur. Tant d’années écoulées, contemplant par-dessus mes frêle épaules le tumulte du passé, je sais aujourd’hui que ces pratiques ne sont pas plus diaboliques que tant d’autres dont je fus témoin au sein de l’Eglise catholique. Violences, injustices, iniquités insondables me paraissent encore plus viles que celles commises par les impies, car si ceux-là ignorent Dieu, les chrétiens fautent en Son Nom.
Des personnages et une histoire inconnus pour moi et qui du coup me donnent envie d’en savoir plus. Alors je ne dis pas non à la rencontre avec ce livre…
Je n’ai pas lu alors difficile de faire la comparaison… mais moi j’avais adoré Le roi d’Afrique et la reine mer, de Jean-Yves Loude, chez Actes Sud, en partenariat avec… Terres d’av…tiens tiens…
D’après le résumé, le style a l’air assez différent…Je vois qu’il a aussi écrit un livre sur …le Cap-Vert « Cap-Vert, notes atlantiques ». A tester…