lundi , 18 mars 2024

L’Abencérage

Auteur: Antonio de Villegas

Editeur: La Reine Blanche – 2017 (84 pages)

Lu en février 2022

Mon avis: Voici un très court récit de Antonio de Villegas, écrivain espagnol du 16ème siècle.
L’histoire se déroule à la fin du 15ème siècle, quelque temps avant la chute de Grenade (1492). A l’époque, l’actuelle Espagne était divisée notamment entre le royaume chrétien de Castille et le royaume musulman de Grenade.
Une nuit, non loin de la frontière, une patrouille, menée par le gouverneur local Rodrigo de Narváez, capture, après une rude bagarre, l’Abencérage* Abindarráez. Le jeune homme se rendait en secret dans la ville voisine pour y épouser Jarifa, sa bien-aimée. Désespéré d’avoir été fait prisonnier et de ne pouvoir se marier, il confie son désarroi à Narváez. Celui-ci, ému par l’histoire, décide de libérer le jeune homme pour lui permettre d’aller retrouver sa fiancée, tout en lui faisant jurer de revenir se constituer prisonnier trois jours plus tard, promesse qui sera honorée.

Placé sous les auspices de la vertu et de ses valeurs de courage, de justice, de tempérance et de sagesse, ce récit met donc face à face un chrétien et un musulman, tous deux imprégnés du même esprit chevaleresque noble et inébranlable. Deux hommes qui font preuve l’un envers l’autre d’une tolérance telle qu’elle dépasse leurs différences de culture et de religion, et fait triompher les valeurs précitées, auxquelles on peut encore ajouter le respect et la confiance.
Ecrit en 1565 dans un contexte d’intolérance croissante à l’égard des « morisques » (qui aboutira à leur expulsion pure et simple d’Espagne en 1609), ce texte idéaliste et humaniste – et audacieux vu le risque de censure – veut montrer que la vertu est universelle et n’est en aucun cas l’apanage d’une culture ou d’une religion. Eclairé par la présentation de la traductrice Isabelle Taillandier et la postface de Eduardo Torres Corominas, et joliment illustré par Louise Heugel, ce récit est un petit bijou de subversion élégante et délicate, dont le message est toujours actuel.

*Les Abencérages étaient une famille de nobles musulmans de Grenade, installés en Espagne depuis le 10ème siècle.

En partenariat avec les Editions de La Reine Blanche (merci pour le joli marque-page!) via une opération Masse Critique de Babelio.

Présentation par l’éditeur:

Ce délicieux récit, érigé en parangon du meilleur humanisme propose, au travers de la fiction, un exemple de relation entre individus professant des fois différentes mais qui, grâce au dialogue, posent sur l’échiquier un système de valeurs de portée universelle, basé sur une vertu permettant de maîtriser tout type d’affrontements, le tout dans un très grand respect de la liberté de l’autre. C’est seulement en suivant ce chemin, par le biais de la parole et de l’exemple personnel, qu’il est possible de restaurer l’harmonie entre les hommes, sans modifier violemment ou de quelque façon que ce soit leurs caractéristiques identitaires. C’est donc un texte idéaliste mais complètement engagé dans la réalité de son temps, un texte dans lequel on montre comment changer ce monde de dissensions et de différences à travers le seul chemin vraiment possible et durable : celui qui passe par la transformation du cœur de l’homme. (Eduardo Torres Corominas)

Evaluation :

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4 commentaires

  1. Merci pour cette découverte, je vais télécharger la VO pour découvrir ce récit 🙂