Auteur: José Falero
Editeur: Métailié – 26 août 2022 (304 pages)
Lu en septembre 2022
Mon avis: A Porto Alegre, Pedro et Marques, deux jeunes hommes issus des favelas, travaillent comme rayonnistes dans un supermarché. Pedro vit avec sa mère, et Marques avec femme et enfant (plus un deuxième en route), dans des bicoques délabrées. Leur travail sous-payé ne permet pas à ces esclaves post-modernes d’espérer autre chose que de gagner tout juste de quoi se nourrir.
Mais Pedro a un plan pour sortir de cette pauvreté crasse qui lui colle à l’avenir. Imprégné de ses lectures autodidactes (dans le bus à l’heure de pointe) de Marx et consorts, il n’est que trop conscient de sa condition d’exploité, et rêve d’argent et de train de vie confortable. A force de rhétorique et de raisonnements acrobatiques mais imparables, Pedro parvient à convaincre Marques d’embarquer dans son projet, qui au final s’avère aussi amoral qu’efficace. Jusqu’à un certain point. Jusqu’à ce que la rentabilité de leur petit bizness suscite la convoitise de gangsters d’un autre calibre.
« Supermarché » est un roman truculent et plein d’humour, mais qui fait cependant rire jaune, parce qu’il projette une lumière crue et impitoyable sur la misère et la violence des favelas brésiliennes, et plus largement sur les inégalités sociales et économiques et la corruption endémique dans ce pays dit « émergent ». Un pays dans lequel les travailleurs honnêtes n’arrivent pas à s’enrichir, ni même à vivre décemment : « il [un livreur de drogue] était heureux et satisfait de sa vie : sa dignité et son estime de soi atteignaient des niveaux que le travailleur honnête ne connaît malheureusement pas au Brésil ».
José Falero, lui-même issu d’une favela, sait de quoi il parle, et il le fait rudement bien, avec un art consommé du dialogue, des personnages attachants, une intrigue bien construite et qui entretient un certain suspense. Jubilatoire et dramatique, « Supermarché » est un premier roman remarquable.
En partenariat avec les Editions Métailié.
#Supermarché
Présentation par l’éditeur:
« Tout le monde imagine une vie meilleure, mon pote. C’est ce qui maintient les gens en vie, avec l’envie de vivre, en vrai », déclare Pedro révolté.
Peut-on devenir dealer d’herbe en restant fidèle à ses principes ? Peut-on utiliser les théories de Marx pour conquérir sa dignité ?
Dans les favelas de Porto Alegre, deux rayonnistes de supermarché, aux allures d’un Don Quichotte lettré et d’un Sancho Panza révolté, vont se lancer dans une aventure trépidante pour échapper à leur exploitation dans un travail mal payé et dénué de sens. Entre trafiquants, gangsters et vieux manuels d’économie lus dans les transports publics bondés, entre Marx et Tarantino, un premier roman plein d’humour, provocateur et stimulant.