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Toutes les couleurs de la nuit

Auteur: Karine Lambert

Editeur: Calmann-Lévy – 17 avril 2019 (325 pages)

Lu en avril 2019

Mon avis: Et si on vous annonçait brutalement que dans un mois vous alliez devenir aveugle, sans espoir de guérison ? Incrédulité, déni, panique, colère, désespoir. C’est ce ciel noir et effrayant qui vient de s’effondrer sur la tête de Vincent. A 35 ans, ce professeur de tennis, compétiteur dans l’âme, a tout pour être heureux, amour, travail, santé, le monde lui appartient. Mais le couperet est tombé : neuropathie optique de Leber (parenthèse: curieux comme ça rime avec Alzheimer, cancer, misère et tous ces enfers de la vie qui peut-être pourraient être atténués ou réparés si on leur accordait quelques-uns de ces faramineux millions que certains déboursent « généreusement » pour rebâtir une cathédrale. Parce qu’une cathédrale, ça se reconstruit, ça se remplace. Une vie humaine, c’est une autre paire de manches, hein ? Voilà, ceci n’avait rien à voir avec le roman, mais c’est dit, le coup de gueule est clos). Pour Vincent, le compte à rebours avant les ténèbres est lancé, alors c’est l’urgence, il ne veut en parler à personne, prend la fuite, s’égare, se fourvoie, finit par se terrer à la campagne dans l’ancienne maison de ses grands-parents. Et puis il faut bien l’annoncer aux autres. Eux aussi doivent encaisser le choc. Paradoxalement, les plus proches s’enfuient ou encombrent Vincent de leur sollicitude maladroite, tandis que la bouée de sauvetage viendra de ceux qu’on attendait le moins. Lorsqu’un matin, la nuit ne laisse plus la place à la lumière mais seulement à quelques ombres périphériques, Vincent s’accroche à ses souvenirs d’enfance, à la sagesse bonhomme de son grand-père et, littéralement autant que symboliquement, à la terre, à ses racines et au potager qu’il avait tout juste remis en état. Se déplacer mains en avant, trébucher, se cogner, jurer, tomber, en vouloir au monde entier puis (ré)apprendre le goût, l’odorat, le toucher, s’adapter, se laisser aider, se laisser aimer, se réinventer, s’apaiser en se souvenant des images du passé, comprendre qu’un avenir peut être construit, que l’amour est possible au-delà du handicap, tel est le parcours du combattant de Vincent, la lente résilience après le cataclysme.
Pour son quatrième roman, Karine Lambert s’est beaucoup documentée et a interviewé malvoyants et spécialistes. Loin de nous assommer de baragouin scientifique et de psychologie de l’acceptation, elle décrit l’humain, ses failles et ses forces avec beaucoup de sensibilité et d’empathie. J’ai trouvé son écriture très visuelle (étrange de dire ça pour un tel sujet, mais l’auteure est aussi photographe, ceci explique cela) et sensorielle. Quelque part entre mélancolie et espoir, Toutes les couleurs de la nuit est un roman tout en retenue et en nuances d’ombre et de lumière.

En partenariat avec les Editions Calmann-Lévy.

#LisezVousLeBelge

Présentation par l’éditeur:

Le diagnostic est irrévocable. D’ici trois semaines, Vincent aura perdu la vue. Confronté à son destin, ce prof de tennis de trente-cinq ans qui avait tout pour être heureux expérimente le déni, la colère et le désespoir.
Comment se préparer à vivre dans l’obscurité? Sur qui compter? Alors que le monde s’éteint petit à petit autour de lui et que chaque minute devient un parcours d’obstacles, il se réfugie à la campagne où il renoue avec ses souvenirs d’enfance. Les mains plongées dans la terre, Vincent se connecte à ses sens, à l’instant présent et aux autres. Il tente de gagner le match de sa nouvelle vie.
C’est l’histoire lumineuse d’une renaissance, d’une transmission familiale et d’un amour hors normes. Une immersion sensorielle dans un univers méconnu.

Une citation:

– Dis papa, pourquoi les oiseaux chantent le matin?
– Parce qu’ils savent qu’ils ont survécu à la nuit.

Evaluation :

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4 commentaires

  1. Sage-Glarner Yannick

    Comme je plussoie votre coup de gueule. Merci

  2. J’aime bien ton coup de gueule que je partage d’ailleurs. Et pour ce qui est du livre, il est bien difficile de faire face au handicap et de l’accepter…