Auteur: Jax Miller
Editeur: J’ai lu – 2018 (639 pages)
Lu en novembre 2018
Mon avis: A Cane, dans les montagnes de Pennsylvanie, il y avait du rose et des bonbons. Le rose des néons du parc d’attractions de Candyland, le rose de la vie heureuse d’une petite ville prospère grâce à son industrie minière florissante. Aujourd’hui Candyland et les mines ont fermé, mais, dans l’ancien « cœur sucré de l’Amérique », il reste les bonbons fabriqués par Sadie dans sa confiserie, les plus beaux et les meilleurs du monde.
A Cane, coin perdu dans les Appalaches, il y a du blanc, chaque hiver, qui recouvre tout d’un manteau de pureté. Mais ne laissez pas votre cœur s’attendrir devant ce trompe-l’oeil neigeux…
Parce qu’à Cane, ville déshéritée de la Rust Bell, c’est le noir qui domine et envahit tout, les cœurs, les esprits et même les poumons. Les habitants en broient depuis le déclin des mines et la « reconversion », en toute impunité, de Candyland en centre local de fabrication de meth.
A la misère financière et intellectuelle, à l’alcool et à la drogue, il faut ajouter la violence pour que le tableau soit d’un noir profond. En l’occurrence c’est Thomas, 34 ans, le fils de Sadie, qui vient d’être assassiné par Allison. L’un gendre idéal et l’autre camée notoire dont le père a été condamné pour meurtre, on se demande pourquoi ils étaient en couple. Le grand amour, peut-être. Mais à Candyland, rien n’est moins sûr… C’est l’inspecteur Braxton, alcoolique et à deux doigts de la retraite, qui hérite de cette sombre affaire. Simple en apparence, elle l’oblige néanmoins à remonter le temps et à démêler des nœuds enfouis sous les tapis depuis 34 ans. A cela s’ajoutent la disparition de trois gamins, et la rencontre de Sadie et Danny, le père d’Allison. Rencontre qui pourrait être un conte de fées, mais à Candyland…
Ambiance et relations malsaines, violence, perversités, corruption, crimes sordides, Cane est un bled où le rêve américain s’est pitoyablement échoué sur un tas de charbon, et qui donne un avant-goût de l’enfer : « Voilà ce qu’était Cane : les ruines d’une cité oubliée. Sodome et Gomorrhe, une merde de chien collée à la semelle de Dieu« . Le contraste est d’autant plus frappant avec le comté voisin, rural, où vit une communauté amish, qui vaque paisiblement à ses occupations bien loin de la vie moderne. L’ancienne patrie de Sadie, qui s’en est enfuie 34 ans auparavant.
Une construction magistrale faite de flash-backs et de rebondissements, des personnages très aboutis, profondément marqués par la vie, l’amour ou son absence, dans un environnement des plus glauques, avec cependant quelques lueurs d’espoir au loin. L’écriture est puissante et sonne juste, sans pathos ni froideur, avec ce qu’il faut d’empathie là où il faut. Malgré quelques longueurs et quelques incohérences (me semble-t-il : pas sûre que le « trajet » de la pièce d’or soit toujours vraisemblable. Et l’épilogue de l’accident de Danny me laisse perplexe), voilà un roman très fort.
Je n’ai aucune intention d’aller à Candyland, mais j’ai bien envie de lire l’autre roman de Jax Miller.
Présentation par l’éditeur:
Candyland. Sadie Gingerich, une ancienne amish, est seule dans sa confiserie d’une ville minière de Pennsylvanie. Sa vie est bouleversée lorsque son fils est assassiné par sa petite amie, Allison. Cruauté du destin, Sadie rencontre Danny, le père d’Allison, en proie à ses propres démons. Leurs lourds passés et le choc du meurtre s’entremêlent pendant l’enquête de police, révélant une vérité indicible.
Entre les doux pâturages de la communauté amish, les montagnes isolées du Nord et les villes minières abandonnées de la Rust Belt, la vie et l’amour sont broyés, laminés par la drogue et la pauvreté de l’Amérique rurale. Un lieu où les rêves ne se réalisent jamais et où les fins heureuses n’existent pas.
Sous des dehors sucrés, Candyland semble bien amer. Belle critique qui donne bien envie de goûter ce bonbeon piquant !
Oui, sans hésiter! Malgré (ou grâce à) sa noirceur, il est magnifique.