mercredi , 8 octobre 2025

La joie ennemie

Auteure: Kaouther Adimi

Editeur: Stock – 20 août 2025 (256 pages)

Lu en septembre 2025

Mon avis: Dans la collection « Ma nuit au musée », Kaouther Adimi a choisi de passer une nuit à l’Institut du monde arabe (IMA), à la veille d’une exposition consacrée à la peintre Baya (1931-1998).

L’Algérie est le point commun entre les deux femmes, l’Algérie coloniale puis indépendante pour Baya, celle de la décennie noire pour l’auteure, enfant à l’époque.

Kaouther Adimi est née en Algérie en 1986 et y a vécu quelques années avant d’émigrer en France avec sa famille. En 1994, alors que la guerre civile fait rage et que le GIA multiplie attentats et assassinats, le père de l’auteure décide de ramener sa famille au pays. Une décision folle, aberrante, mais l’homme, militaire de carrière, n’écoute que sa loyauté de soldat, au mépris de la sécurité la plus élémentaire.

Tandis qu’elle parcourt les salles de l’IMA, l’auteure revoit, revit une scène tragique de cet été 1994, alors qu’ils sont tout juste rentrés en Algérie. Face aux peintures colorées de Baya, quelque chose se dénoue en elle, qui l’aide à enfin dépasser ce traumatisme qui la hante, ses peurs, sa douleur, et à les coucher sur le papier. Ce n’est sans doute pas par hasard que Kaouther Adimi a choisi l’IMA et cette exposition : elle a découvert l’œuvre de Baya pour la première fois en 2009 au musée des Beaux-Arts d’Alger, et c’est face à ses tableaux qu’elle a réellement pris conscience de sa liberté inédite et de tous ses possibles.

Kaouther Adimi nous emmène à sa suite dans ses déambulations à travers l’IMA et dans sa mémoire, de ses souvenirs d’enfance et d’adolescence en Algérie à ses études et sa vie en France. Elle y entremêle le récit de la vie de Baya, dont le talent précoce l’a rendue célèbre alors qu’elle n’avait que 15 ans et l’a conduite à Paris en 1947 où ses œuvres sont exposées pour la première fois. L’art de Baya, orpheline, lui a aussi permis de s’émanciper et d’échapper à la tutelle de sa famille maltraitante.

En recherche de vérité sur sa propre histoire, l’auteure passe la nuit à interroger ses souvenirs et à les confronter à ce que ses proches lui ont raconté pour essayer de remplir les vides. Et quand la tâche se fait trop douloureuse, elle puise dans les tableaux de Baya la couleur et la lumière qui lui redonnent du souffle.

Même s’il m’a semblé que le récit intime de l’auteure prenait un peu trop le pas sur la biographie de Baya (dont je n’avais jamais entendu parler), ce texte sur la mémoire, la transmission, la liberté, les racines et l’art qui émerge malgré l’obscurité et l’obscurantisme, est touchant de sincérité.

En partenariat avec les Editions Stock via Netgalley.

#Lajoieennemie #NetGalleyFrance

Présentation par l’éditeur:

Kaouther Adimi passe une nuit à l’Institut du monde arabe pour raconter le destin de Baya, peintre algérienne prodige, célébrée par Matisse et Picasso ; mais dans le silence du musée, un autre récit s’impose.
En 1994, alors que l’Algérie s’enfonce dans la violence, ses parents choisissent de retourner s’y installer avec leurs enfants. Le lendemain de leur arrivée, la voiture familiale tombe sur un faux barrage tenu par le GIA, le Groupe islamique armé, premier événement d’une série de tragédies liées à la décennie noire.
Pourquoi ses parents ont-ils voulu rentrer alors que tous ceux qui le peuvent fuient le pays ? Comment se construire lorsque le passé hante et dévore vos nuits ?
L’autrice confronte ses souvenirs, tente de combler les silences, de faire émerger ce qui a été enfoui. Et explore ce que l’on transmet, ce que l’on tait et ce que l’on reconquiert.
Un texte puissant où l’art est un contrepoint lumineux à l’obscurantisme.

Evaluation :

Voir aussi

Les vulnérables

Auteure: Sigrid Nunez Editeur: Stock – 20 août 2025 (272 pages) Lu en août 2025 …

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.