Auteur: Yasunari Kawabata
Editeur: Le Livre de Poche – 1982 (124 pages)
Prix Nobel de littérature 1968
Lu en juin 2014
Mon avis: Oserai-je dire que je n’ai pas aimé ? que je me suis ennuyée ? que même sans être belle, j’ai néanmoins failli être endormie (et sans qu’il soit besoin d’une drogue quelconque) par les états d’âme du vieil Eguchi, ses dialogues trop subtils avec son hôtesse, la description millimétrique du moindre mouvement d’un bras ou d’une paupière ?
Les « belles endormies » sont de jeunes, très jeunes filles prostituées d’une façon particulièrement malsaine : droguées le soir par leur maquerelle, déshabillées et couchées nues dans un lit, inconscientes jusqu’au lendemain, elles servent au plaisir de clients âgés qui passent la nuit à leurs côtés. Ceux-ci peuvent regarder, toucher, mais pas violer. D’ailleurs, ils seraient bien en peine de commettre un tel exploit, puisqu’ils sont en principe de « vieux décrépits, plus tout à fait des hommes ».
Le vieil Eguchi qui, lui, n’est pas encore un « homme de tout repos » (à force de le répéter, on finit par le savoir…), se rend pour la première fois dans ce lieu étrange. Cette première nuit fait remonter à la surface des souvenirs enfouis de femmes, maîtresses, épouse, filles. Piqué par la curiosité, il y reviendra à plusieurs reprises, dormant chaque fois avec une fille différente.
Quelle raison pousse ces hommes âgés à s’allonger auprès d’une jeune fille inconsciente ? certitude de ne pas être ridicule ou moqué ? peur d’affronter la réalité de leur décrépitude avec une « vraie » femme, fantasme de vieillard libidineux, illusion d’être encore séduisant et viril, nostalgie d’un plaisir appartenant à un passé révolu, recherche d’un dernier réconfort avant la mort ? N’y a-t-il pas aussi un certain masochisme dans cet ersatz d’amour physique ?
Réflexion sur la vieillesse, la solitude et la mort, empreint de sensualité mais jamais vulgaire, ce récit trace le portrait d’un vieil homme centré sur lui-même, qui ne s’est jamais embarrassé de fidélité envers son épouse. Entre touchant et pathétique, ce livre renvoie une image de la femme qui ne m’est guère sympathique : celle d’un objet, d’un jouet dépourvu de conscience, qu’on présente comme consentante puisque prostituée, mais qui, droguée, n’aurait cependant aucun moyen de s’opposer aux attouchements qui la gêneraient.
Comme vous voyez, je n’ai sans doute rien compris à la poésie de ce chef-d’oeuvre de la littérature japonaise…
Présentation par l’éditeur:
Dans quel monde entrait le vieil Eguchi lorsqu’il franchit le seuil des Belles Endormies ? Ce roman, publié en 1961, décrit la quête des vieillards en mal de plaisirs. Dans une mystérieuse demeure, ils viennent passer une nuit aux côtés d’adolescentes endormies sous l’effet de puissants narcotiques.
Pour Eguchi, ces nuits passées dans la chambre des voluptés lui permettront de se ressouvenir des femmes de sa jeunesse, et de se plonger dans de longues méditations. Pour atteindre, qui sait ? au seuil de la mort, à la douceur de l’enfance et au pardon de ses fautes.
J’ai beaucoup aimé ce roman si dérangeant dont le sujet éclaire sur la sexualité des vieillards…