mardi , 8 octobre 2024

Troisièmes noces

Auteur: Tom Lanoye

Editeur: Editions de la Différence – 2014 (447 pages)

Lu en août 2019

Mon avis: Tom Lanoye était manifestement en grande forme lorsqu’il a écrit ce roman.
Pas comme son héros et narrateur. Maarten Seebregs a la cinquantaine maladive et déprimée. Au chômage depuis quelques années, il ne se remet pas de la perte de Gaétan, l’amour de sa vie, mort après une longue maladie. Un jour, le destin de Maarten change de voie, pour le meilleur ou pour le pire, ça reste à voir. Un inconnu lui propose, moyennant un joli paquet d’espèces sonnantes et trébuchantes, d’épouser sa fiancée africaine, le temps pour la demoiselle d’obtenir un titre de séjour et la nationalité belge, après quoi elle pourra divorcer pour épouser son fiancé (l’inconnu, donc), lequel se trouve déjà dans le collimateur de la police des étrangers après deux mariages douteux avec d’autres gentes dames étrangères. Maarten se lance donc dans ce mariage blanc et hétérosexuel avec une Noire, avec tous les mensonges que cela implique envers les services de l’immigration. Un mariage blanc qu’il accepte pour sa généreuse dot financière, mais qui vire peu à peu au gris au fil des péripéties mouvementées qui émaillent leur vie commune, et qu’un improbable attachement se tisse entre eux.
Tom Lanoye en grande forme, disais-je, parce qu’il dresse avec une fougueuse maestria le portrait d’un misanthrope cynique puissance 1000, parfois un brin sentimental tout de même et pas avare en humour noir. Mais cette grande forme m’a un peu épuisée, par trop de digressions qui coupent l’élan, de scènes de sexe très crues qui ont fini par m’écœurer, et par quelques pages finales interminables. Je préfère Tom Lanoye dans une veine plus personnelle (La langue de ma mère, Les boîtes en carton).
Mais « Troisièmes Noces » est lui aussi un roman grinçant écrit dans une langue flamboyante, qui, entre Anvers et Ostende, nous emmène dans les tréfonds d’une âme humaine en perdition et, entre les lignes, dans le marécage du racisme et de la politique migratoire belgo-européenne.

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Présentation par l’éditeur:

« Tu te maries avec elle, tu vis avec elle. Mais si tu la touches, je te massacre. » C’est le deal qu’accepte Maarten Seebregs, homosexuel dans la cinquantaine au chômage, en deuil de son ami Gaétan mort à l’hôpital, pour épouser, moyennant finances, la petite amie africaine de Norbert Vandessel en délicatesse avec la police des étrangers. Un mariage blanc avec une Noire…
A partir de cette situation tragi-comique, Tom Lanoye dresse un portrait au vitriol de la misère moderne dans une Europe dont la Belgique est le cœur. Solitude, contrôles, surveillance, petitesses, arnaque, tout tue la vie dans cette grisaille où tente de pénétrer l’Afrique, incarnée par la belle Tamara.

Quelques citations:

– La seule cathédrale à la construction de laquelle on travaille encore est la Sagrada Familia de Gaudí à Barcelone. Son matériau favori était la vaisselle cassée: la Sainte Famille ramenée aux dimensions d’un champ de bataille avec utilisation de l’arme spécifique des querelles de ménage. Les conséquences sont aisées à deviner. Davantage de touristes que de fidèles.

– (A propos des Japonais): Je dois l’avouer, on ne peut pas leur nier une tendance à l’épure et à l’occupation maximale de l’espace. Surtout dans les grandes villes. Mais à la campagne, même Gaétan ne raffolait pas de leurs portes en papier de riz, dans un pays qui connaît de telles intempéries et un typhon à l’occasion. C’est une jolie manière de faire des économies de bois, ces choses coulissantes légères comme des plumes. Mais un peuple qui ne peut pas de temps en temps claquer les portes à faire trembler toute la maison ne doit pas s’étonner d’une propension à la névrose et d’une tendance à conclure dans le sang les conflits de voisinage et les amours adolescentes. 

– La démocratie est un concept embêtant quand on est dans la minorité.

Evaluation :

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