Auteure: Irène Frain
Editeur: Seuil – 6 octobre 2023 (288 pages)
Lu en octobre 2023
Mon avis: Régulièrement interpellée par ses lecteurs, Irène Frain réfléchit dans ce livre sur sa pratique d’écrivaine. Face aux questions sur sa méthode de travail, ses trucs et astuces, ses rituels d’écriture ou ses sources d’inspiration, elle a rapidement réalisé qu’elle n’avait pas de conseils infaillibles ou de « secrets d’écriture » à partager, sauf peut-être celui de se reconnecter à l’imagination de notre enfance.
Pas de recette universelle donc, alors l’auteure nous raconte sa propre expérience et remonte à l’origine de son désir d’écrire, en complétant son récit de multiples anecdotes et références littéraires, et en brocardant au passage les manuels et autres blogs de « trucs et ficelles » qui, moyennant parfois l’achat de « fiches personnages », vous garantissent des héros « irrésistibles » ou « attachants ».
Voilà quelques jours à peine que j’ai terminé ce livre et, à part ce que je viens de résumer et quelques citations, il ne m’en reste presque rien. Je ne sais pas trop ce que j’en attendais, en tout cas pas une « recette » ou une révélation, je sais que ça n’existe pas. Mais, moi qui ressens souvent, confusément, le besoin ou l’envie d’écrire mais sans savoir (sur) quoi écrire, j’espérais y lire des bribes d’expérience qui m’auraient parlé, mais non. Je reste avec mon manque d’imagination sur les bras, et un manque d’inspiration qui fait que je ne saurais dire grand-chose de plus de ce livre.
En partenariat avec les Editions du Seuil via Netgalley.
#Ecrireestunroman #NetGalleyFrance
Présentation par l’éditeur:
« Un rêve de livre vous habite et vous suit partout, mais il vit sa vie et vous la vôtre. Un jour vous le tenez, le suivant, il n’est plus là. Cette folie, d’avoir voulu défier la réalité avec pour toute arme une pauvre épée de papier ! »
Attentive aux questions de ses lecteurs, Irène Frain réfléchit sur sa pratique depuis des années. En animant des ateliers d’écriture, elle a découvert qu’elle ne pouvait pas donner de conseils aux apprentis écrivains sans leur apprendre comment apprivoiser les peurs qui précèdent nécessairement tout acte créatif.
À leurs blocages, les manuels de « trucs et ficelles » ne répondent pas, alors qu’il est des chemins pour retrouver la créativité spontanée et l’imagination qui nous habitaient pendant notre enfance.
Plutôt que de livrer de mythiques « secrets d’écriture », Irène Frain a préféré partager son expérience au fil de récits où elle se remémore la naissance de son propre désir d’écrire. Elle illustre son propos d’exemples concrets et de références littéraires universelles. D’où un livre au ton unique, drôle, incisif, accessible, qui invite tous ceux qui aiment lire à vivre enfin l’inégalable aventure de l’écriture.
Quelques citations:
– C’est que la légende des « secrets d’écriture » est tenace et, plus têtu encore, le rêve qui l’habite, obtenir d’un écrivain admiré ou envié l’arsenal de recettes qu’il est censé avoir réuni afin d’accomplir ce prodige: entraîner le lecteur dans un monde parallèle et l’y emprisonner, captif à ce point subjugué qu’à la façon des victimes du syndrome de Stockholm, il prend cette prise d’otage pour une merveilleuse évasion, persuadé que l’univers où l’écrivain l’a enfermé – décor, personnages, espace-temps – est plus passionnant, plus pertinent, plus authentique que le sien.
– Certains [lecteurs] m’avaient aussi affirmé qu’ils en avait eu et qu’ils l’avaient perdue [l’imagination]. « Vers douze-treize ans », avaient-ils lâché; et quand j’avais voulu savoir ce qui s’était passé, ils avaient presque tous incriminé le système scolaire: « A partir de cet âge-là, on nous demande uniquement d’apprendre, et plus d’inventer ». Puis, nostalgiques, ils avaient évoqué leur enfance.
– On le pressent quand on entreprend d’écrire: on va se dévoiler ou être dévoilé. Et cependant, comme lorsqu’on a envie de faire l’amour, on passe outre. Mieux, on le désire, ce dévoilement. Au risque d’être rejeté, répudié au sens étymologique du terme: désigné à la vue de tous comme un être repoussant, incapable de susciter tout désir, et par conséquent, écrasé de honte.
– Notre faim d’histoires, toujours aussi insatiable, a la même source: peur de la mort et de ce qui nous rappelle la mort, la nuit, la maladie, le deuil, la guerre; et ces heures d’anxiété sournoise, l’attente, l’ennui, qu’à juste titre nous appelons des « temps morts ».
Ceux qui racontent des histoires, quels qu’ils soient, sont donc de grands réanimateurs. Grâce à eux, le temps reprend vie. Il était muet, il nous reparle. Il ne bougeait plus, il se lève, marche, nous empoigne, puis nous entraîne dans un monde parallèle dont les lois, même quand elles sont sans pitié, nous paraissent plus limpides. Ainsi, lorsqu’une histoire nous « prend », nos peurs s’évanouissent.