Auteure: Natasha Brown
Editeur: Grasset – 3 septembre 2025 (240 pages)
Lu en septembre 2025
Mon avis: Le roman s’ouvre sur un article publié dans un célèbre magazine britannique, où il est question d’un homme violemment agressé à coups de lingot d’or dans une ferme isolée du Yorkshire.
L’article présente les différents protagonistes de ce fait divers et leur entourage. L’agresseur est un pauvre type démuni qui s’est enfui avec le lingot, lequel s’avère invendable ; la victime est le leader d’un groupuscule anarchiste dénommé « les Universalistes », lesquels squattent la ferme susmentionnée ; le propriétaire des lieux est aussi un pauvre type mais pas démuni, puisqu’il est le prototype du banquier converti au capitalisme le plus forcené. Intervient également une chroniqueuse célèbre pour son franc-parler et ses convictions anti-woke, et qui s’avère être la mère de l’agresseur.
Dans les chapitres suivants, on fera connaissance avec la jeune journaliste auteure de l’article, et on verra comment elle a manipulé les faits pour les transformer en une histoire génératrice de clics qui lancera peut-être sa carrière et lui permettra de prendre une revanche sur ses « amis » d’université qui la snobent depuis qu’ils ont, eux, réussi dans la vie. On verra également comment la journaliste a elle-même été utilisée par la personne qui l’a tuyautée sur l’histoire du lingot, laquelle avait besoin d’un coup de buzz. Enfin, on découvrira le vrai visage de chaque personnage.
Ce roman est rebondissant, au sens où il oblige le lecteur à réajuster sans cesse son point de vue à mesure qu’il découvre les intérêts plus ou moins divergents et égocentriques des protagonistes et qu’il reconstitue la vérité en juxtaposant les versions de chacun.
« Les Universalistes » sont un portrait acide de l’Angleterre actuelle et de sa multiculturalité tant vantée, en vertu de laquelle les minorités sont tellement privilégiées qu’au final elles conduisent au déclassement de ceux qui n’en font pas partie. Il est donc aussi question de justice sociale, de racisme, de wokisme, de liberté d’expression et de tolérance, d’esprit critique, d’individualisme, du pouvoir des mots et de la manipulation de la vérité par le langage à des fins purement intéressées. Ce n’est pas joli-joli mais c’est malheureusement réaliste. Et l’auteure met les différents camps face à face, sans prendre parti, laissant le lecteur trancher.
A la fois cruel et jouissif avec son humour grinçant qui fait un peu penser à « Bienvenue au club » de Jonathan Coe, un roman intelligent et remarquablement construit.
En partenariat avec les Editions Grasset via Netgalley.
#LesUniversalistes #NetGalleyFrance
Présentation par l’éditeur:
Dans une ferme isolée du Yorkshire, un homme est brutalement assommé à l’aide d’un lingot. Que faisait le principal suspect de cette attaque au milieu d’un groupe de squatteurs ? Qui est le propriétaire de cette demeure et de cette arme en or massif ? Hannah, une jeune journaliste, a mené l’enquête et interrogé tous les protagonistes pour nous livrer le récit précis des événements : un banquier cynique, une polémiste iconoclaste et un groupuscule anarchiste dont les chemins n’auraient jamais dû se croiser.
Mais lorsque se termine l’article d’Hannah, publié par un célèbre magazine, la caméra change soudain d’épaule et nous rencontrons les acteurs de ce drame devenu viral. Au centre de cette galaxie de personnages se trouve Lenny, chroniqueuse et autrice de deux livres viscéralement « anti-woke ». Grande gueule, maligne, drôle – et délicieusement détestable –, elle aussi connaît le pouvoir d’un récit efficace. Hannah avait besoin de l’histoire du lingot pour lancer sa carrière de journaliste, Lenny avait besoin de visibilité pour accroître sa surface médiatique. Mais à jouer avec les lecteurs, c’est toute la société qu’on risque de mettre à feu…
Les Universalistes explore le pouvoir du langage et questionne notre vigilance face à l’information. La plume de Natasha Brown est d’une férocité jouissive et nous rappelle que derrière une plaisanterie ou une métaphore bien sentie, se cachent parfois des discours dangereusement populistes. Un roman aussi addictif que brillant qui a déjà conquis le Royaume-Uni.