Auteur: Paolo Cognetti
Editeur: Le Livre de Poche – 2018 (288 pages)
Prix Strega Jeunesse 2017 – Prix Médicis étranger 2017
Lu en avril 2019
Mon avis: Les huit montagnes, c’est l’histoire d’une amitié indéfectible entre deux gamins devenus adultes à l’ombre de figures paternelles troublées. Pietro est un petit gars de la ville, que ses parents emmènent chaque année de Milan au petit village de Grana, dans les montagnes du Val d’Aoste. Bruno, son futur alter-ego alpestre, est un rude montagnard en devenir, dans ce coin perdu négligé par les touristes. D’été en été, au fil des échappées dans les alpages, le long du torrent ou sur les sommets environnants, les garçons fraternisent, un lien profond se tisse entre eux, fait de peu de mots. Ils ont en commun de vivre une relation compliquée avec leurs pères respectifs, qui leur ont pourtant chacun transmis leur amour de la montagne, de cet univers rude et sauvage, à la fois hostile et réconfortant. A l’âge adulte, les chemins des deux amis se séparent. Ou plutôt, celui de Pietro s’écarte de celui de Bruno, jusqu’au bout inamovible comme un roc, autant que sa montagne à laquelle il reste enraciné par le cœur. Pietro mettra vingt ans à y revenir, et contre toute attente « grâce » à son père. Grana redevient son port d’attache dans son errance et sa quête de soi, parce qu’il ne peut s’empêcher de partir et repartir dans l’Himalaya, à la recherche d’autres montagnes authentiques et encore vierges de tourisme de masse.
Que dire encore après 169 critiques sur Babelio ? Ce que j’ai ressenti à la lecture de ce livre me rappelle ce que j’éprouve quand je vais en montagne. Beauté, force, grandeur et puissance de la Nature, qui se débrouille parfaitement sans l’humain. Lequel devrait faire preuve d’humilité devant ces chefs-d’œuvre de pierre au lieu de les défigurer en y aménageant des pistes de ski. Mais je m’égare. Bref, ce texte est lui aussi magnifique, grandiose et sobre, avec ses deux personnages principaux tellement attachants, l’un si sûr de son destin, entêté même, intègre, solide, l’autre moins assuré mais d’une loyauté à toute épreuve. Mention spéciale aux mères des deux garçons, héroïnes ordinaires dont la présence discrète est tout sauf accessoire. Dans cet hymne à l’amitié, la montagne est bien plus qu’un décor, elle est une raison de vivre, un espoir, un refuge, et le réceptacle d’histoires familiales tristes et de solitudes infinies. Nostalgie, pureté, beauté, ce sont les mots qui pour moi ressortent de cette lecture inspirée (une fois de plus :-)) par Bookycooky.
Présentation par l’éditeur:
Pietro est un enfant de la ville. L’été de ses onze ans, ses parents louent une maison à Grana, au cœur du val d’Aoste. Là-bas, il se lie d’amitié avec Bruno, un vacher de son âge. Tous deux parcourent inlassablement les alpages, forêts et chemins escarpés. Dans cette nature sauvage, le garçon découvre également une autre facette de son père qui, d’habitude taciturne et colérique, devient attentionné et se révèle un montagnard passionné.
Vingt ans plus tard, le jeune homme reviendra à Grana pour y trouver refuge et tenter de se réconcilier avec son passé.
Hymne à l’amitié, histoire familiale, ce texte splendide nous fait aussi et surtout ressentir la force de la montagne, personnage à part entière, capable de bousculer des existences et de transformer des êtres.
Une citation:
– Si l’endroit où tu te baignes dans un fleuve correspond au présent, pensai-je, dans ce cas l’eau qui t’a dépassé, qui continue plus bas et va là où il n’y a plus rien pour toi, c’est le passé. L’avenir, c’est l’eau qui vient d’en haut, avec son lot de dangers et de découvertes. Le passé en aval, l’avenir en amont. Voilà ce que j’aurais dû répondre à mon père. Quel que soit notre destin, il habite les montagnes au-dessus de nos têtes.