Auteur: Lucie Tesnière
Editeur: Flammarion – 2018 (412 pages)
Lu en avril 2020
Mon avis: Ce livre a pour sous-titre « Une famille française à travers deux guerres mondiales« . Vaste sujet et vaste période, et pourtant ce témoignage raconte encore bien plus que cela.
En 2012, l’auteure découvre la correspondance de son arrière-grand-père, Paul Cabouat. Mobilisé en 1914 alors qu’il étudie la médecine, il y parle de sa guerre, passée à soigner les blessés au combat. Intriguée par la sobriété et la pudeur de ses lettres, Lucie Tesnière décide de creuser plus profond et, avec l’aide de quelques membres de la famille, met au jour d’autres lettres, des carnets, des photos, qui dévoilent des destins incroyables. Bien vite, elle comprend qu’elle ne veut/peut pas limiter son enquête à la Première Guerre mondiale. Elle continue donc à tirer le fil de l’histoire de sa famille pour arriver à la Deuxième Guerre. Son travail de recherche évolue, elle n’a plus de lettres sur lesquelles se baser, la correspondance de l’époque étant rare, censurée ou codée. Alors elle interroge les quelques témoins encore vivants, leurs descendants, des historiens, épluche des montagnes d’archives publiques ou privées. Résistance, collaboration, déportation à Ravensbrück, les histoires de certains membres de la famille s’avèrent étroitement liées à la Grande Histoire.
Et donc ces presque 400 pages racontent en effet comment une famille française a traversé deux guerres. Mais ces pages sont aussi le résultat d’un déclic provoqué par la lecture des carnets d’un aïeul, l’aboutissement d’un projet inattendu dans lequel Lucie Tesnière s’est lancée sans savoir où il la mènerait, mais convaincue qu’elle devait aller au bout, pour sa famille mais peut-être avant tout pour elle-même. Et c’est ce qui rend son texte si captivant et si touchant. Elle raconte l’histoire de ses aïeux, évidemment, mais aussi celle, actuelle, de ceux qui sont vivants et qu’elle a mis à contribution en sollicitant leurs souvenirs, suscitant autour d’elle rassemblements familiaux, intérêt, solidarité, admiration, incompréhension parfois. Et puis surtout, en même temps que la genèse de son livre, Lucie Tesnière se raconte elle-même : elle qui n’a jamais rien écrit, qui n’est ni historienne ni journaliste, lâche son boulot et sa vie quotidienne pour s’improviser « détective historique » et porter son projet à terme, qui lui prendra quatre ans. Moi qui suis obsédée par la recherche du mot « juste », j’aime beaucoup sa phrase « Je suis constamment en train de me demander si ce que j’écris est juste ». Elle illustre l’humilité de la démarche de celle qui craint d’interpréter et d’extrapoler erronément les faits ou de donner l’impression de juger, qui sait qu’elle n’a pas la formation ni toutes les informations objectives pour rédiger un essai historique. Ce n’est d’ailleurs pas son but. Ecrit dans un style simple et fluide, ce livre, en plus d’être intéressant, est sincère, profondément humain et fait naître beaucoup d’émotions, celles qui font écho à son titre.
Présentation par l’éditeur:
En 2012, Lucie Tesnière découvre les lettres de son arrière-grand-père, Paul Cabouat, médecin dans les tranchées pendant la Grande Guerre. Elle commence alors une enquête qui va la mener sur les traces de sa famille à travers les deux guerres mondiales et changer le cours de sa vie. En fouillant dans les archives et en interrogeant les descendants, elle met au jour des histoires incroyables, mêlant Résistance, collaboration, amours, amitiés et trahisons.
À travers le récit captivant de cette famille, agrémenté de photos et de nombreux témoignages d’époque, c’est une histoire de la France au XXe siècle qui se dessine au fil des pages.
Un livre d’une puissance émotionnelle rare.