Editeur: Editions Nevicata – 2016 (90 pages)
Lu en octobre 2016
Mon avis: 90 petites pages pour parler du Congo ? Quel défi ! Demandez donc à « Madame Colette », alias Colette Braeckman, journaliste au quotidien belge Le Soir et spécialiste de l’Afrique des grands lacs. Malgré d’innombrables allers-retours au Congo, ce pays démesuré continue à lui échapper. C’est en 1961, peu après l’indépendance de l’ancienne colonie belge, et surtout juste après l’assassinat de Patrice Lumumba (figure de l’indépendance et éphémère premier Premier ministre) que la future reporter décide qu’un jour, elle ira voir là-bas « pour regarder. Pour comprendre. Pour raconter. Des décennies plus tard, je raconte toujours, ou en tout cas j’essaie, mais je ne suis pas encore sûre d’avoir compris ».
Dans ces 90 pages qui abordent un pays grand comme quatre fois la France, il est évidemment impossible d’être exhaustif, alors on approche le Congo par petites touches, petits effleurements qui donneront au lecteur l’envie (ou pas) de pousser plus avant ses investigations. On commence avec la colonisation et son paternalisme, à l’oeuvre jusqu’en 1960, mais qui se ressent encore aujourd’hui, à travers le manque de confiance en soi des Congolais, paradoxalement mêlé à la conviction orgueilleuse d’appartenir à un pays exceptionnellement riche. Puis vient le règne de Mobutu qui entreprit, avec la « zaïrianisation », de consolider l’identité du pays en nationalisant les entreprises et en revenant aux coutumes, aux vêtements et aux prénoms traditionnels. Mobutu, l’homme fort d’un pays aux ressources ultra-convoitées, dont les Américains profitèrent tant que dura la guerre froide. Une fois celle-ci terminée, « on » (Américains, Belges et surtout multinationales) s’aperçoit qu’il est temps de se débarrasser de l’encombrant dictateur. « On » pousse alors dans le dos Laurent-Désiré Kabila qui, surfant sur l’instabilité provoquée au Kivu par l’afflux d’1,5 million de réfugiés rwandais lors du génocide, finit par renverser le « maréchal » en 1997. Et le « grand capital » de piller le pays… Il y a aussi le Kivu, à l’est, à la frontière avec le Rwanda et le Burundi, indéfiniment en situation de guerre malgré la présence d’une mission des Nations Unies (Monusco). Il y a surtout les femmes, qui ont subi ces troubles en payant le prix fort, au plus profond de leur chair, et il y a, heureusement, le Dr Denis Mukwege, prix Sakharov du Parlement Européen en 2014, qui les « répare ».
Et puis il y a encore le contraste entre l’abondance des ressources naturelles (le coltan, notamment) et la pauvreté de ceux qui travaillent dans les mines, dans des conditions dantesques. L’importance de l’argent et d’un bon repas, la frime, la corruption, la débrouille, le fatalisme et le rôle de la diaspora. La bonne humeur, la sensualité et la musique. Un peu de légèreté dans un pays chaotique où il faut sans cesse revenir « pour vérifier si ça change vraiment, pour être sûre que ce n’est pas toujours la même chose ». Un solide petit aperçu du Congo par une auteure qui transmet parfaitement sa fascination pour ce pays inénarrable.
Merci à Masse Critique de Babelio et aux éditions Nevicata (collection L’âme des Peuples).
#LisezVousLeBelge
Présentation par l’éditeur:
Un pays ? Pas tout à fait, tant ses frontières sont convoitées et disputées. Un continent ? Pas complètement. Un peuple ? Pas si sûr. Alors, une fresque ?
Evidemment ! Le Congo est un tableau peint au rythme de l’Afrique, sur une toile immense où l’ardeur de survivre et l’ingéniosité forment les ressorts d’une naïveté apparente et si séduisante.
Le Congo est musical, il danse, il chante, il vibre quand il rit et quand il pleure, sur les rives du grand fleuve, cette artère profonde de l’Afrique remontée par des aventuriers tout droits sortis du coeur des ténèbres.
Ce petit livre n’est pas un guide. C’est un décodeur. La rumba congolaise y rythme l’amour et les folies de la vie. Le courage des femmes outragées par les guerres interminables y révèle la détermination de surmonter les décennies d’horreur. Un récit à l’image des Congolaises, rempli de leur folle énergie et ode à l’éternelle maternité de l’Afrique.
Un grand récit suivi d’entretiens avec Isidore Ndaywel, Maddy Tiembe et Freddy Tsimba.
Tu as gagné, je pars au Congo ! N’inscris ce livre dans ma PAL. Les anciennes colonies occidentales ont bien du mal à se faire une place au soleil, même africain…
Oui c’est un peu toujours la même histoire… La colonisation a fait des dégâts partout (cf L’amant de Patagonie)…
Il a l’air intéressant ce petit livre !
Oui, c’est un petit aperçu assez général mais qui balaie l’ensemble du pays. C’est le concept de cette collection (L’âme des peuples, de Nevicata). J’ai lu celui sur l’Argentine, et j’ai dans ma PAL celui sur Cuba, où je pars bientôt 😉
Tu vas te régaler à Cuba. Une collègue en revient et m’a montré les photos. Waouh !
C’est ce que tout le monde me dit 🙂