Auteur: Quentin Müller
Editeur: Marchialy – 16 avril 2025 (350 pages)
Lu en juillet 2025
Mon avis: Quentin Müller s’est rendu à deux reprises sur l’île de Socotra, en 2021 et 2023. Et il n’y retournera probablement plus, puisque son second séjour s’est terminé par une quasi-expulsion de l’île. Mais commençons par le commencement.
Un jour, l’auteur, journaliste indépendant, entend parler pour la première fois d’arbres étranges et multi-millénaires, dont la sève rouge leur vaut le surnom de « sang des frères ». Cette variété particulière d’arbres-dragons, ou dragonniers, ne poussent que sur l’île de Socotra, ancien sultanat indépendant rattaché au Yémen en 1967, et située en Mer d’Arabie, presque à l’entrée du golfe d’Aden, au large des côtes yéménites et somaliennes.
Ce bout de terre montagneux et aride occupe donc une position stratégique, convoitée par les frères ennemis que sont l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis.
Quentin Müller, spécialiste de la péninsule arabique, ne pouvait donc qu’avoir envie de découvrir cet archipel isolé passé sous les radars de la médiatisation.
Après bien des tracas administratifs, il obtient l’autorisation de s’y rendre, sous la couverture de prof de français. Il embarque dans l’aventure Clémence, la jeune femme qu’il a rencontrée à peine quelques mois plus tôt, et qui a fini par se laisser convaincre, au bout de longues tergiversations.
Hébergés dans des conditions spartiates, ils découvrent leur nouvel environnement, s’y adaptent tant bien que mal, donnent des cours à l’école locale et visitent l’île. Quentin joue sur un tableau supplémentaire, enquêtant le plus discrètement possible sur les ingérences saoudienne et émiratie dans la vie de l’archipel. Ingérences dont les habitants n’ont que faire, mais qu’ils subissent et craignent : « La géopolitique régionale est devenue un sacré puzzle où chaque pièce est interchangeable à l’infini en fonction des péripéties, le fameux Orient complexe. Depuis la fin du panarabisme, il n’est plus du tout question de conviction politique et d’idéaux sociétaux ou économiques, mais d’alliances circonstanciées, se composant et se décomposant sans réelle logique, si ce n’est celle du pouvoir, des ressources et de l’argent. Isolés du monde, les Socotris avaient jusque-là vécu plutôt paisiblement, exemptés de ces guerres d’ego. Les meurtres étaient et sont toujours des événements rares dans l’archipel, mais Ali et bien d’autres avaient peur que l’état d’esprit des insulaires change et que l’ingérence étrangère venue de par-delà les mers dénature profondément Socotra ».
Après quelques mois riches en émotions et tensions, le couple rentre en France. Quentin retourne à Socotra en 2023, mais cette fois ne parvient pas à camoufler sa véritable profession. Peu après son arrivée, il est arrêté, interrogé, assigné à résidence par les autorités qui le perçoivent comme un espion dans un Yémen toujours en proie à la guerre civile. Sous la menace d’un procès, il quitte l’île à la première occasion, désormais persona non grata.
Entre reportage et récit de mésaventures, l’auteur raconte ses découvertes, ses déboires sentimentaux, administratifs et policiers, son questionnement. Ses réflexions portent autant sur la géopolitique et l’histoire compliquée du Yémen que sur le quotidien des Socotris, pacifistes avant tout, leur culture, leurs traditions, ou encore sur la géographie et la végétation locales.
Pas évident de s’y retrouver dans l’imbroglio régional, mais la découverte est intéressante. Sans pour autant donner envie d’aller visiter ce coin du globe.
En partenariat avec les Editions Marchialy via une opération Masse Critique de Babelio.
Présentation par l’éditeur:
lI est une île qui a la particularité d’abriter des forêts d’arbres vieux de vingt millions d’années dont la sève rouge leur vaut le surnom de « sang des frères ». C’est ainsi que Quentin Müller entend parler pour la première fois de Socotra, une île rattachée au Yémen. Alors qu’il enquête sur l’ingérence des pays voisins, Quentin Müller comprend vite que ce petit bout de terre rocailleux recèle plus d’un secret : un sultan déchu bien qu’adulé, des pay-sages de pierres et de sable à la beauté étrange, des grottes immenses, un peuple de bergers et de pêcheurs gardiens de mille histoires et légendes.
Entre le reportage journalistique et le récit d’aventures, L’Arbre et la Tempête invite à découvrir cette île magnétique, au cœur d’enjeux géopolitiques majeurs.