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Plus haut que la mer

Auteur: Francesca Melandri

Éditeur: Folio – 2016 (224 pages)

Lu en août 2020

Mon avis: Ce jour-là de 1979, le mistral souffle fort sur le Détroit. Malgré l’avis de tempête, le ferry a quitté le port, emmenant ses passagers vers l’Île. Parmi ceux-ci, aucun touriste, uniquement des agents de la prison de haute sécurité construite sur l’Île, ainsi que Luisa et Paolo. Ils ne se connaissent pas, ou pas encore, ils viennent d’endroits et d’univers totalement différents. Lui est un intellectuel citadin, veuf, bourgeois aisé, ancien professeur de philosophie. Elle est une paysanne dans un village de montagne, habituée aux travaux des champs et du foyer depuis le plus jeune âge, et qui maintient sa ferme et élève ses cinq enfants, seule. Leur point commun est d’avoir un parent prisonnier dans l’Île. Paolo rend visite à son fils, membre des Brigades Rouges, avec des litres de sang sur les mains, répandu froidement, tandis que Luisa va voir son mari violent, criminel de droit commun, assassin de deux hommes sur des coups de sang.

Après la visite au parloir, le vent est tel qu’ils ne peuvent quitter l’Île. On met à leur disposition quelques pièces aménagées dans un bâtiment désaffecté de l’administration, où ils passent la nuit sous la surveillance de Nitti, agent carcéral. Au fil des heures se tisse alors entre eux une certaine complicité, fugace mais intense, de celles qui surgissent lorsque des âmes tourmentées se reconnaissent. Après cette nuit, ils sauront, chacun à sa façon, mettre des mots sur ce qui les oppresse, ce qu’ils ne se sont jamais avoué à eux-mêmes. Culpabilité, soulagement, libération, peur de sa propre part d’ombre violente, cette nuit de tempête a remué les âmes et les emporte vers un nouveau départ comme sur une vague de résilience.

Dans ce roman, dans l’Italie des années 70-80, la violence de la nature indomptable semble répondre à la violence des hommes « maîtrisée » en l’occurrence par une prison de haute sécurité. Dans ce contexte particulier, l’auteure dépeint une période troublée, où les attentats politiques s’ajoutent à la violence ordinaire, où la violence ne s’arrête pas à l’entrée de la prison, où elle atteint même l’intégrité de ceux chargés d’y maintenir l’ordre.

« Plus haut que la mer » est un roman touchant et délicat, qui décrit avec une grande justesse le ressenti des personnages, tout en laissant les non-dits exprimer beaucoup de poésie et de profonde humanité. Malgré un épilogue superflu, ce roman est à la fois doux et amer, déchirant et apaisé.

Présentation par l’éditeur:

1979. Paolo et Luisa prennent le même bateau, chacun de son côté, pour se rendre sur l’Île. Mais ce n’est pas un voyage d’agrément, car c’est là que se trouve la prison de haute sécurité où sont incarcérés le fils de Paolo et le mari de Luisa. Ce dernier est un homme violent qui, après un meurtre commis sous le coup de la colère, a également tué un surveillant en prison, tandis que le premier a été reconnu coupable de plusieurs homicides politiques sur fond de révolution prolétarienne. L’homme et la femme ne se connaissent pas, Paolo est professeur de philosophie, mais il n’enseigne plus ; Luisa, elle, est agricultrice et élève seule ses cinq enfants. À l’issue du voyage et de la brève visite qu’ils font au parloir de la prison, ils ne peuvent repartir comme ils le devraient, car le mistral souffle trop fort. Ils passent donc la nuit sur l’Île, surveillés par un agent, Pierfrancesco Nitti, avec qui une étrange complicité va naître. Pour ces trois êtres malmenés par la vie, cette nuit constitue une révélation et, peut-être aussi, un nouveau départ.

Avec Plus haut que la mer, Francesca Melandri livre un deuxième roman incisif et militant, une superbe histoire d’amour et d’idées qui est aussi une subtile réflexion sur le langage, celui de la politique et celui du monde dans lequel nous vivons.

Evaluation :

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