Auteur: Andreï Makine
Éditeur: Grasset – 6 janvier 2021 (216 pages)
Lu en février 2021
Mon avis: Quelque part dans les années ’70, au fond de la froide et désolée Sibérie soviétique, le narrateur, un orphelin de 13 ans, se lie d’amitié avec Vardan, un an plus âgé. D’origine arménienne, Vardan est arrivé avec sa famille dans ce bout du monde, à 5000km du Mont Ararat, pour suivre dans leur exil les prisonniers arméniens, déportés de leur terre natale pour cause de nationalisme anti-soviétique. La petite communauté s’est installée au Bout du Diable, un quartier déshérité en bordure de la ville, à côté de la prison.
Peut-être parce qu’il est orphelin et n’a jamais connu la chaleur d’un vrai foyer, le narrateur est fasciné par la solidarité qui règne entre les Arméniens, leur générosité malgré leur dénuement, leur force et leur noblesse de caractère, leurs traditions et l’histoire tragique de leur peuple, qu’il découvre au fil des récits de la mère de Vardan.
Si cette histoire d’amitié adolescente, pourtant brève, a durablement marqué le narrateur, elle ne m’a pas touchée, moi. Je ne suis pas arrivée à y croire, je n’ai pas ressenti ce que le narrateur a ressenti, je n’ai pas vraiment compris pourquoi cette histoire a pris autant d’ampleur dans sa vie, j’ai eu l’impression qu’il magnifiait et adulait à l’excès tout ce que pouvaient dire ou faire Vardan et sa famille. Malgré que la vie les ait déjà durement malmenés malgré leur jeune âge, j’ai trouvé ces deux gamins trop précoces avec leurs échanges philosophiques de vieux sages.
Avec une certaine poésie, le récit fait la part belle aux thèmes de la nostalgie et de la mémoire, dans un style formellement irréprochable, mais trop classique et trop lisse à mon goût. Je n’y ai pas trouvé le supplément d’âme qui m’aurait rendu cette histoire inoubliable.
En partenariat avec les Editions Grasset via Netgalley.
#Lamiarménien #NetGalleyFrance
Présentation par l’éditeur:
A travers l’histoire d’une amitié adolescente, Makine révèle dans ce véritable bijou de littérature classique un épisode inoubliable de sa jeunesse.
Le narrateur, treize ans, vit dans un orphelinat de Sibérie à l’époque de l’empire soviétique finissant. Dans la cour de l’école, il prend la défense de Vardan, un adolescent que sa pureté, sa maturité et sa fragilité désignent aux brutes comme bouc-émissaire idéal. Il raccompagne chez lui son ami, dans le quartier dit du « Bout du diable » peuplé d’anciens prisonniers, d’aventuriers fourbus, de déracinés égarés «qui n’ont pour biographie que la géographie de leurs errances. »
Il est accueilli là par une petite communauté de familles arméniennes venues soulager le sort de leurs proches transférés et emprisonnés en ce lieu, à 5 000 kilomètres de leur Caucase natal, en attente de jugement pour « subversion séparatiste et complot anti-soviétique » parce qu’ils avaient créé une organisation clandestine se battant pour l’indépendance de l’Arménie.
De magnifiques figures se détachent de ce petit « royaume d’Arménie » miniature : la mère de Vardan, Chamiram ; la sœur de Vardan, Gulizar, belle comme une princesse du Caucase qui enflamme tous les cœurs mais ne vit que dans la dévotion à son mari emprisonné ; Sarven, le vieux sage de la communauté…
Un adolescent ramassant sur une voie de chemin de fer une vieille prostituée avinée qu’il protège avec délicatesse, une brute déportée couvant au camp un oiseau blessé qui finira par s’envoler au-dessus des barbelés : autant d’hommages à ces « copeaux humains, vies sacrifiées sous la hache des faiseurs de l’Histoire. »
Le narrateur, garde du corps de Vardan, devient le sentinelle de sa vie menacée, car l’adolescent souffre de la « maladie arménienne » qui menace de l’emporter, et voilà que de proche en proche, le narrateur se trouve à son tour menacé et incarcéré, quand le creusement d’un tunnel pour une chasse au trésor, qu’il prenait pour un jeu d’enfants, est soupçonné par le régime d’être une participation active à une tentative d’évasion…
Ce magnifique roman convoque une double nostalgie : celle de cette petite communauté arménienne pour son pays natal, et celle de l’auteur pour son ami disparu lorsqu’il revient en épilogue du livre, des décennies plus tard, exhumer les vestiges du passé dans cette grande ville sibérienne aux quartiers miséreux qui abritaient, derrière leurs remparts, l’antichambre des camps.