Auteur: Carlos Caillabet
Editeur: Editions Baromètre – 1er novembre 2022 (192 pages)
Lu en décembre 2022
Mon avis: Montevideo, 1960. Tomy, 14 ans, et sa mère, sont obligés de quitter leur maison, faute de pouvoir payer le loyer. Ils ne comptent plus sur l’aide du père de Tomy, qui ne donne plus signe de vie depuis qu’il est parti chercher du travail en Argentine après avoir été viré de son emploi pour avoir participé à une grève. La mère de Tomy a vendu leurs meubles, et ils ont à présent tout juste de quoi tenir deux mois dans leur nouveau foyer, une pension de famille pompeusement nommée « Hôtel Lebac ». Ils y découvrent un petit univers dans lequel les autres pensionnaires sont, comme eux, à la limite de la précarité. Un couple de personnes âgées, deux étudiants en médecine, une infirmière militaire peu commode, un homme qui préfère vivre dans une pension que seul dans sa grande maison, et désormais Tomy et sa mère. Tous tentent de s’entendre plus ou moins cordialement, sous la houlette à peu près bienveillante de Mr Lebac, propriétaire des lieux, et usurier à ses heures perdues.
En dehors de ce microcosme contrasté, fait de solidarité, de frustrations, de mesquineries et de générosité, Tomy découvre également, au fil de ses escapades en ville avec son nouveau copain Julio, la « vraie » vie, en côtoyant, entre autres, une prostituée et un patron de bar adepte de paris clandestins.
Roman initiatique, « Hôtel Lebac » raconte une année dans la vie d’un adolescent en route vers l’âge adulte. Un passage qui n’est pas sans difficultés, fait d’arrachements et de désillusions. Mais heureusement pour lui, le Tomy de 14 ans ignore encore tout des heures sombres, économiques et politiques, dans lesquelles l’Uruguay va plonger quelques années plus tard. Le Tomy narrateur, par contre, qui écrit cette histoire bien après les événements, sait à quoi s’attendre, d’où la tonalité mélancolique du récit.
A la fois chronique sociale douce-amère et galerie de portraits savoureux, ce roman est tendre et lucide, très drôle par moments. La plume de Carlos Caillabet est toute en sobriété, simple mais addictive. Sous les auspices de J.D. Salinger et avec un clin d’oeil à John Fante et son double Arturo Bandini, « Hôtel Lebac » (le seul livre de l’auteur traduit en français, pour l’instant?) est une mélancolique mais belle découverte. « Je n’ai pas tardé à comprendre qu’il en serait tout autrement et que ce monde heureux, sûr et ordonné n’existe pas pour des gens comme ma mère et moi. Mais c’est une autre histoire que je raconterai peut-être un jour. Pas maintenant car, s’il y a bien une chose que j’ai apprise, c’est que dès lors qu’on commence à raconter, le monde entier se met à nous manquer – comme cela m’arrive quand je repense à ce monde, si petit et si grand, de l’Hôtel Lebac ».
En partenariat avec les Editions Baromètre.
Présentation par l’éditeur:
Montevideo, automne 1960. Marta et son fils Tomy sont contraints de quitter leur maison pour s’installer dans une pension de famille des faubourgs de la capitale. Du haut de ses 14 ans, l’adolescent dépeint son nouveau lieu de vie, populaire et bigarré, et ses pérégrinations hors de la pension. Dans ce monde d’adultes, entre Lebac, l’imposant propriétaire de l’établissement, Elsa, l’infirmière revêche, et don Manuel, le patron de bar douteux, sans oublier sa mère en quête d’émancipation, comment grandir et trouver sa place ?
Narré avec sobriété et humour, ce roman d’initiation nous plonge dans l’univers intimiste d’une microsociété contrastée. Un regard tendre et acéré sur un monde en mutation, entre tragédie et comédie humaine.