mardi , 8 octobre 2024

Les ennemis de la vie ordinaire

Auteur: Héléna Marienské

Editeur: Flammarion – 2015 (319 pages)

Lu en septembre 2015

les ennemis de la vie ordinaireMon avis: Docteur, j’ai peur… Peur de commencer à écrire cette chronique. Pas parce que je crains de devenir accro à l’écriture (ça non, impossible, sinon je n’aurais plus assez de temps à consacrer à mon addiction de base, la lecture. Mais peut-être suis-je en plein déni ? mais dans ce cas, même si je suis addict aussi à l’écriture, les poly-addictions ont aussi du bon, non ? cf plus loin. Et puis de toute façon, j’arrête quand je veux), mais parce que j’ai peur du diagnostic.

Parce que ce roman m’a mis la tête en vrac, mais qu’est-ce qui m’arrive, je ne sais pas quoi en penser, mon cerveau m’envoie des signaux contradictoires. Avis aux psychanalystes freudiens parmi vous, aux psycho-analytico-comportementalistes, aux systémiques, aux psycho-théra- ou psycho-taré-peutes, aux guérisseurs de psychotiques (tac-boum) borderline, je vous résume les symptômes, en vrac, comme je disais, parce que, à force de compter les rails de coke de JC et les doses d’héro de Mariette, de passer des heures à la roulette avec Gunter, d’assister aux séances quotidiennes de 3000 abdos de Pablo et de suivre Mylène dans ses virées shopping à 4 zéros sur le chéquier, moi j’ai plus les idées très claires.

Donc, ça commence comme une quête très sérieuse, une recherche de la guérison (ou de la rédemption, selon JC), avec Clarisse, psychologue qui veut tester sur ses patients une méthode révolutionnaire. Une thérapie de groupe innovante, genre les addicts anonymes, qui réunit des patients souffrant d’addictions différentes (drogue, sexe, alcool, jeu, sport,…) : on les met ensemble, on les laisse parler (ou pas), et on voit ce qui se passe (à ce stade, ça sent déjà le foutage de tête psychologiquement incorrect). Les patients sont des addicts extrêmes, qui mettent leur santé ou leur vie en danger, ou, au minimum leur portefeuille. Certains sont détestables ou ridicules, d’autres font vraiment pitié, tous sont dans une souffrance sans nom, voudraient en sortir mais ne trouvent jamais plus de 5 minutes la volonté nécessaire. Bref, des épaves. C’est au moment où le lecteur se prend à espérer que la thérapie va malgré tout porter ses fruits qu’arrivent la rechute des patients, la chute du roman, la décadence de tous, et ça part en vrille, ça dérape, ça déjante dans un total n’importe quoi. On envoie furieusement balader tout l’arsenal « psy », et quitte à s’enfoncer pour ne plus remonter, allons-y joyeusement et partageons nos problèmes (comprendre : goûtons aux addictions des autres). Mais avant ça, réglons nos dettes pour pouvoir en profiter plein pot ensuite, et donc, direction Las Vegas et ses tournois aux gains millionnaires.

Voilà, je ne sais pas quoi penser de ces « ennemis de la vie ordinaire ». Roman fluide, rapide à lire, au style moderne que l’auteur adapte en fonction des personnages, totalement  immoral mais jouissif, écoeurant mais accrocheur, ce n’est pas tellement le fait que la psycho-chose soit tournée en ridicule qui me gêne, c’est plutôt que les malades le soient. Mais heureusement, tout ça n’est pas réaliste, hein, docteur…

Conclusion : j’ai aimé et je n’ai pas aimé, alors j’hésite : suis-je schizophrène ou masochiste ? C’est grave, docteur ?

Prescription : retour à la vie ordinaire…

Merci aux éditions Flammarion et à Babelio pour cette découverte.

Présentation par l’éditeur:

L’un boit, l’autre sniffe, le troisième fornique à corps perdu. Les autres ne sont pas en reste. Tous sont addicts et se trouvent embarqués dans une thérapie de groupe d’un nouveau genre. Ils y trouveront ce qui n’était pas prévu : la polyaddiction. Ça secoue. Mais pas seulement : car ces ennemis de la vie ordinaire vont aussi découvrir dans le groupe l’entraide, l’amitié, et l’amour, le bel amour. Comédie hilarante, portée par une écriture brillante et rythmée, ce roman s’empare d’un sujet de société contemporain, l’addiction, pour mieux le détourner : un conte moderne aussi réjouissant qu’immoral. Abstinents s’abstenir.

Héléna Marienské est l’auteur de Rhésus (POL, 2006, prix Lire du meilleur premier roman, prix Madame Figaro/Le Grand Véfour, Mention Spéciale du prix Wepler), Le Degré suprême de la tendresse (Héloïse d’Ormesson, 2008, prix Jean-Claude Brialy) et de Fantaisie-Sarabande (Flammarion, 2014).

Evaluation :

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3 commentaires

  1. Bienvenue chez les psy… Regarder et laisser faire et raconter ce qu’on voit. Ou alors clause de non-ingérence. Bizarre, vous avez dit bizarre ? Comme c’est bizarre.

  2. J’ai adoré la première moitié du roman. Découvrir ces addictions, les voir se réunir pour discuter, se tirer dessus ou faire sa mauvaise tête. Il y a un côté jouissif à les suivre, tous plus détraqués les uns des autres.

    Et puis la « psy » qui jette l’éponge et que l’on ne retrouvera plus (dommage, j’aurais bien aimé un véritable dénouement pour ce personnage, plutôt que de la retrouver aux abonnées absents des chapitres suivants). Et cette fin qui est à mon avis un poil trop long.

    Une comédie bien déjantée avec un coté à la fois critique et burlesque qui montre ce que nous sommes devenus dans cette société-là, même si l’auteure en exagère les traits et rend comique ces addictions.

  3. Le titre me plait bien.