Auteure: Lola Lafon
Editeur: Stock – 17 août 2022 (180 pages)
Lu en août 2022
Mon avis: « Quand tu écouteras cette chanson » fait partie de la collection « Ma nuit au musée » des Editions Stock, dont le principe est le suivant : demander à un auteur de choisir un musée dans lequel il aimerait passer la nuit, à charge pour lui de mettre ensuite ses impressions et réflexions par écrit.
Le choix de Lola Lafon s’est porté sur le musée Anne Frank à Amsterdam. Elle s’y est rendue le 18 août 2021 et y a passé la nuit, seule avec son ordinateur. Enfin, seule, façon de parler. Pourtant, ce n’était pas tant les fantômes d’Anne Frank et des sept autres personnes qui ont été cachées dans l’Annexe de juillet 1942 au 4 août 1944 pour échapper aux nazis, entouraient Lola Lafon. Non, ce qui hante le musée, la nuit, ce n’est pas tant une présence, c’est l’absence. L’absence d’objets (l’Annexe est resté tel quel, quasi vide, depuis que les nazis l’ont dévasté), l’absence de vie, l’absence d’Anne Frank, cette jeune fille que le monde entier s’est approprié telle une icône, et dont le Journal a été et sera lu par des générations d’écoliers.
Lola Lafon déambule dans le musée, hésite à entrer dans la chambre d’Anne Frank, s’interroge sur sa propre légitimité à écrire sur la jeune fille, fait entrer en résonance (sans les assimiler) l’histoire de sa propre famille, juive également, avec celle des Frank, évoque aussi le souvenir d’un ami d’enfance cambodgien, sur le point de rentrer dans son pays avec ses parents diplomates, sans imaginer le danger qu’ils couraient, alors que les Khmers rouges viennent d’arriver au pouvoir.
Lola Lafon tente de nous faire appréhender le Journal non pas tant comme un témoignage du confinement forcé d’une jeune fille juive et de sa famille pendant deux ans, que comme un texte littéraire en tant que tel, insistant sur le fait qu’Anne Frank voulait faire œuvre d’écrivaine et souhaitait voir son journal publié. Elle revient aussi sur la construction hollywoodienne du mythe Anne Frank dans les années 60, avec pour résultat un film ultra-lisse, presque rose bonbon, voire kitsch, sans allusion au désespoir ni image des camps de concentration.
Le destin fauché d’Anne Frank serre le cœur évidemment, Lola Lafon écrit très bien, avec beaucoup de sensibilité et de délicatesse. C’est très beau, très juste, mais, pour une raison qui m’échappe, cela ne m’a pas vraiment touchée.
En partenariat avec les Editions Stock via Netgalley.
#Quandtuécouterascettechanson #NetGalleyFrance
Présentation par l’éditeur:
« Le 18 août 2021, j’ai passé la nuit au Musée Anne Frank, dans l’Annexe. Anne Frank, que tout le monde connaît tellement qu’il n’en sait pas grand-chose. Comment l’appeler, son célèbre journal, que tous les écoliers ont lu et dont aucun adulte ne se souvient vraiment.
Est-ce un témoignage, un testament, une œuvre ?
Celle d’une jeune fille, qui n’aura pour tout voyage qu’un escalier à monter et à descendre, moins d’une quarantaine de mètres carrés à arpenter, sept cent soixante jours durant. La nuit, je l’imaginais semblable à un recueillement, à un silence. J’imaginais la nuit propice à accueillir l’absence d’Anne Frank. Mais je me suis trompée. La nuit s’est habitée, éclairée de reflets ; au cœur de l’Annexe, une urgence se tenait tapie encore, à retrouver. »
Un gros coup de coeur
Une belle écriture, mais bizarrement je n’ai pas été très touchée…
Même pas sur la fin? De toute façon, elle ne joue pas la carte de l’émotion. Elle redonne simplement à Anne Franck davantage d’épaisseur. Et je trouve l’évocation de destins parallèles très enrichissante.
C’est vrai qu’elle donne à Anne Franck une autre dimension que celle de la jeune fille juive fauchée par le nazisme, et cela résonne fort avec le sort de son ami cambodgien.