dimanche , 15 septembre 2024

Source de chaleur

Auteur: Soichi Kawagoe

Editeur: Belfond – 22 août 2024 (424 pages)

Lu en août 2024

Mon avis: Pendant la seconde moitié du 19ème siècle, l’île de Sakhaline, à l’extrême est de la Russie et au nord du Japon, a fait l’objet de partages et de disputes incessants entre ces deux pays, qui ne se préoccupaient guère de demander leur avis aux différents peuples autochtones occupant l’île.

Parmi eux, les Aïnous, qui vivent principalement de la pêche, dans le sud de Sakhaline.

Yayomanekf est un Aïnou né sur l’île, mais a été « déplacé » par les Japonais, avec la majorité de la population aïnoue, sur Hokkaido. « Japonisé » malgré lui, il n’aura de cesse de retourner sur sa terre natale.

Pendant ce temps-là, à l’autre bout de l’Empire russe, Bronislaw Pilsudski, Polonais né dans l’actuelle Vilnius, a dû lui aussi renoncer à sa langue maternelle en raison de la politique russe d’assimilation. Nationaliste et socialiste, il est impliqué dans un complot contre le tsar, et se voit condamné à quinze ans de travaux forcés sur l’île de Sakhaline.

Sur place, pendant ses rares moments de temps libre, il rencontre les Aïnous, s’intéresse à leur culture et leurs traditions, prend conscience et s’offusque de l’impact de la colonisation sur leur mode de vie. Il se lie d’amitié avec eux et Yayomanekf en particulier, apprend leur langue, leur enseigne le russe en échange, et réchauffe son âme à cette chaleur humaine qui lui faisait si cruellement défaut dans son exil abrutissant.

Au fil de bien des rencontres et des péripéties, devenu anthropologue autodidacte, imprégné de ses idéaux nationaliste et socialiste et de l’idée qui le porte à aller « vers le peuple, parmi le peuple », Bronislaw passera une bonne partie de sa vie à tenter de sauvegarder l’identité et la culture aïnoues en les documentant et en leur faisant prendre conscience de leur dignité et de leurs droits.

« Source de chaleur » est un roman historique dont tous les personnages ont existé (Bronislaw étant le frère de Jozef Pilsudski, artisan de l’indépendance polonaise). Il retrace une histoire d’amitié entre deux hommes coupés de leurs racines et contraints d’intégrer une autre culture, une histoire de colonisation et de liberté, de guerres et de supériorité raciale supposée.

Le style n’est pas extraordinaire ni toujours très abouti (peut-être à cause de la traduction?*), et manque de souffle romanesque. On s’y perd parfois entre les différents fils narratifs, mais on en apprend beaucoup sur cette région du monde, son histoire et ses habitants.

*j’ai de plus en plus souvent l’impression que les textes sont d’abord traduits par une IA puis revus (ou pas) par un « vrai » traducteur « artisanal ». Sans compter les coquilles d’édition et l’accord du participe passé.

En partenariat avec les Editions Belfond via Netgalley.

#soichikawagoe #NetGalleyFrance

Présentation par l’éditeur:

Yayomanekf est né sur l’île de Sakhaline. Comme toute sa tribu, les Aïnous, il a subi le déracinement à Hokkaidô imposé par les Japonais. Mais il n’a qu’un rêve : retourner sur la terre de ses ancêtres.

Bronisław Piotr Piłsudski est un universitaire polonais. Accusé d’avoir participé à un complot visant à tuer le tsar, il est condamné à l’exil à Sakhaline.

La rencontre des deux hommes va déboucher sur une entreprise folle : enregistrer les Aïnous, documenter leur mode de vie et prévenir le monde de la tragédie qui se noue sur cette île que se disputent la Russie et le Japon.

Une citation:

– En définitive, l’homme soulignait ce qui paraissait du bon sens établi pour une immense majorité de l’élite intellectuelle de l’Europe de l’époque moderne. A savoir que les humains sont divisés en races portant chacune des caractéristiques innées spécifiques, caractéristiques qui induisent naturellement une hiérarchie entre les races, hiérarchie elle-même justifiée par une hiérarchie des capacités. Le niveau de développement des peuples et des races formait naturellement une échelle linéaire et orientée, avec la race blanche européenne seule en tête du développement, et tous les autres peuples derrière à essayer en pure perte de suivre ses traces, les autres peuples étant catégorisés comme définitivement inférieurs, par définition. Ainsi, c’est sous le couvert d’humanisme que la domination européenne des peuples non européens se trouvait justifiée, et justifié le fait que les Européens inculquent aux peuples inférieurs la mentalité d’envier et d’adorer les Européens.

Evaluation :

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