mardi , 10 décembre 2024

En son absence

Auteur: Armel Job

Editeur: Robert Laffont – 2017 (324 pages)

Lu en juillet 2019

Mon avis: L’absente, c’est Bénédicte, 15 ans. Ce matin de mars 2005, elle ne prend pas le bus qui la conduit tous les jours à l’école. Le soir, elle n’est pas à la maison quand sa mère rentre. Où a-t-elle bien pu passé ? Inquiétude, puis angoisse, la mère alerte son ex-mari, qui se rend au commissariat le lendemain matin. La police ne s’empresse guère : « c’est-une-fugue-Madame-croyez-en-mon-expérience-elle-sera-rentrée-dans-quelques-jours ». Quelques jours, quatre exactement, avant qu’on sache ce qui s’est passé. Fugue, enlèvement, entre-temps les commérages, soupçons, reproches et (pseudo-)révélations vont bon train dans ce petit village des Ardennes belges, près des frontières française et luxembourgeoise : « Un instinct dont elle ignorait l’existence s’était réveillé au fond d’elle-même. Il la prévenait que les humains si paisibles au milieu desquels elle s’imaginait vivre pouvaient, du jour au lendemain, se transformer en bêtes féroces. Ils n’attendaient que le moment propice. La disparition de Bénédicte, dont ils feignaient de se scandaliser, les excitait. Depuis deux jours, les allées et venues de la police leur avait dressé les poils sur la peau. Ils salivaient, ils bandaient leurs forces pour se jeter sur une proie quelconque. Cela faisait trop longtemps qu’ils étaient contraints de se conduire en êtres civilisés« .
En l’absence de Bénédicte, il s’en remue, des rancœurs et des jalousies, il s’en distille, du fiel et du venin. Méchanceté et bêtise, tout cela n’est pas joli-joli, beaucoup de mesquinerie et de bassesse pour vraiment peu de bienveillance. Sans compter le spectre de l’affaire Dutroux qui continue à planer dans tous les esprits depuis près de dix ans. Et c’est justement là que je coince un peu. L’intrigue est située en 2005, soit des années après que la sinistre affaire précitée ait éclaté, et le traumatisme est toujours présent aujourd’hui. Alors je ne comprends pas la nonchalance de la police dans ce roman, ni la guéguerre entre ses différents services, ni la lenteur de réaction des parents, ni l’absence totale de couverture médiatique. Cela m’aurait paru plus vraisemblable si l’auteur avait situé l’histoire avant 1995, année de l’enlèvement des fillettes.
Ce bémol mis à part, ce roman choral est un thriller psychologique subtil et bien ficelé. Il décortique finement la complexité des relations homme-femme et parents-enfants, et celle de l’âme humaine, dont les vices cachés resurgissent parfois brutalement sous la couche de vernis social.
Une fin entre ombre et lumière pour un roman fluide et efficace. Un bon moment de lecture, mais qui fera frémir toute une génération hantée par ces disparitions d’enfants.

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Présentation par l’éditeur:

Mars 2005. Il fait très beau ce matin-là dans le petit village de Montange, au coeur des Ardennes belges. Comme un air de printemps en avance. Bénédicte, quinze ans, revient même sur ses pas pour changer sa doudoune d’hiver contre une veste légère. Un jour plus froid, sans doute aurait-elle marché plus vite pour aller attraper le bus qui, chaque matin, la conduit au lycée dans la ville voisine. Là, non, elle s’attarde, prend le chemin des écoliers…
Bénédicte ne montera jamais dans le bus. Où est-elle passée ? Que lui est-il arrivé ?
Commencent quatre jours d’une insupportable angoisse.
En son absence, le paisible univers du village s’effondre. Les parents s’accablent de reproches, les soupçons volent de maison en maison, on ment, on dissimule. Depuis si longtemps, il ne se passait rien à Montange. Le malheur attise les passions les plus nobles, mais aussi les plus basses.
Un thriller psychologique à la mécanique implacable où se dévoilent tour à tour les pensées les plus intimes – et les plus inavouables – de chacun des protagonistes. Armel Job est décidément un grand romancier de l’âme humaine.

Evaluation :

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2 commentaires

  1. Hélas la disparition d’ados laisse toujours présumer une fugue… Ce thriller semble particulièrement bien construit et haletant. A noter !

    • C’est vrai que le traitement d’une disparition d’ado est sans doute différent de celle d’un enfant.