vendredi , 19 avril 2024

Un mariage anglais

Auteur: Claire Fuller

Editeur: Stock – 2018 (355 pages)

Lu en mai 2018

Mon avis: « Un mariage anglais », ou l’autopsie d’une passion aveugle.
1976. Ingrid, étudiante de 20 ans, tombe follement amoureuse de son professeur de littérature. Gil a deux fois son âge mais cela ne l’empêche pas d’être pris lui aussi dans les filets de la passion. La foudre a frappé, la relation est brûlante, les tourtereaux se marient. Ingrid tombe enceinte et envoie définitivement valdinguer ses rêves et ses certitudes d’adolescente. Elle qui voulait voyager, voir le monde, être libre et surtout pas coincée dans une vie étriquée de ménagère, se retrouve sans diplôme, sans emploi, sans argent, complètement dépendante de son mari, coincée dans leur maison isolée. Mais qu’importe, l’amour triomphera de tout…
1992. Ingrid a déchanté depuis longtemps. Mais elle est toujours mariée à Gil. Celui-ci est devenu un grand écrivain (mais de quelle manière…), et est très souvent absent du domicile conjugal, courant de réceptions mondaines en jupons retroussés. Avec ce mari volage et prodigue, Ingrid n’a toujours ni travail, ni argent, et pas davantage d’instinct maternel malgré ses deux filles, Nan et Flora. Alors du fond de son isolement dans leur maison en bord de mer, elle écrit son amertume à Gil, dans des lettres qu’elle ne lui envoie pas, mais qu’elle cache entre les pages des innombrables livres qui colonisent leur « pavillon de nage ». Et un jour, Ingrid part nager et se volatilise…
2004. Gil, désormais vieil homme, croit apercevoir Ingrid dans la rue. Il se lance à sa poursuite, et fait une chute qui le conduit à l’hôpital. Nan et Flora lâchent tout et accourent au chevet de leur père. Une réunion de famille où les comptes du passé se soldent pour, peut-être, délivrer, libérer l’avenir…
Le récit n’est pas aussi linéaire que dans ma description, il alterne les époques, construisant peu à peu les portraits de Gil et Ingrid. Le premier apparaît comme un colosse d’égoïsme, dont les pieds semblent s’être fragilisés à la disparition d’Ingrid. Celle-ci est un peu plus complexe, mais pas beaucoup plus attachante pour autant. Elle a renoncé à tous ses principes, s’est enfermée dans une vie dont elle ne voulait pas, faisant systématiquement les mauvais choix quand la voie de la liberté s’ouvrait devant elle : enfant, mariage, être femme au foyer et cocufiée, elle accepte tout cela alors que les échappatoires existent. Et quand elle se décide à prendre la sortie (radicale), elle laisse ses deux filles (10 et 15 ans) sur le carreau. Il y a des anti-héroïnes plus sympathiques.
« Un mariage anglais » est un roman porté par une belle écriture, tout en finesse psychologique, sensuel quand les corps s’expriment, pudique quand les sentiments se dévoilent. Le portrait un peu déprimant d’un homme, d’une femme, de leur couple, et l’histoire de ce que devient le feu de la passion quand il a consumé la paille qui le nourrissait.
Et, last but not least, un bel hommage aux livres, qui protègent, libèrent et font rêver.

En partenariat avec les éditions Stock via Netgalley.

Présentation par l’éditeur:

Ingrid a 20 ans et des projets plein la tête quand elle rencontre Gil Coleman, professeur de littérature à l’université. Faisant fi de son âge et de sa réputation de don Juan, elle l’épouse et s’installe dans sa maison en bord de mer.
Quinze ans et deux enfants plus tard, Ingrid doit faire face aux absences répétées de Gil, devenu écrivain à succès. Un soir, elle décide d’écrire ce qu’elle n’arrive plus à lui dire, puis cache sa lettre dans un livre.
Ainsi commence une correspondance à sens unique où elle dévoile la vérité sur leur mariage, jusqu’à cette dernière lettre rédigée quelques heures à peine avant qu’elle ne disparaisse sans laisser de trace.

Evaluation :

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2 commentaires

  1. Donc une belle lecture malgré une héroïne qui ne l’est pas, servie par une écriture attachante et une belle liste de livres à découvrir. C’est un beau bilan !