mardi , 19 mars 2024

Les roses d’Atacama

Auteur: Luis Sepúlveda

Editeur: Métailié – 2003 (159 pages)

Lu en septembre 2018

Mon avis: La phrase « J’étais ici et personne ne racontera mon histoire », gravée sur une pierre du camp de concentration de Bergen Belsen, est le moteur de ce recueil de 35 « histoires marginales ». Poussé par le besoin de rendre hommage aux héros anonymes, Luis Sepúlveda fait oeuvre de mémoire. En quelques pages, il tire de l’oubli ou de l’inconnaissance des personnages dont l’Histoire n’a que peu retenu les noms, et qui ont en commun la résistance. Celle qui s’élève face aux barbaries nazie, chilienne, argentine,…, ou celle qui s’oppose à la « civilisation » détruisant la Nature, bref, la résistance à tout ce qui peut briser la liberté, le bonheur, l’amour, la beauté, l’humanité et son environnement. Ces textes sont écrits avec autant de simplicité et de sobriété que de compassion et de générosité. Plutôt que de dresser un acte d’accusation en règle à l’encontre des dictatures qui ont pulvérisé tant de vies, Sepúlveda, lui-même opposant de la première heure à Pinochet, préfère parler d’humanité, de solidarité et d’espoir. Proclamer sa foi en la nature humaine en dépit de tout ce qui s’acharne à l’asservir ou la pervertir, cela peut sembler idéaliste ou édifiant. En l’occurrence, c’est surtout très touchant. Je ne résumerai que deux de ces « brèves de mémoire ». Dans celle qui donne son titre au recueil, « Les roses d’Atacama », il est question de Fredy, jeune militant socialiste qui sera exécuté par la junte chilienne, et qui, dans un carnet, « notait consciencieusement toutes les merveilles du monde », comme les 320 platanes du Parque Forestal de Santiago, et surtout la floraison éphémère des roses dans le désert d’Atacama, le plus aride du monde. La deuxième, « Un certain Lucas », raconte l’histoire d’un groupe de jeunes gens fuyant Buenos Aires et la répression militaire en 1976-77 et se réfugiant au fin fond de la Patagonie. Au début confrontés aux conditions climatiques hostiles, ils bénéficient très vite de la solidarité des paysans locaux qui les aident à survivre. Lorsque le « progrès néo-libéral » atteint ces contrées pour s’enrichir en déboisant la région, le groupe, avec un certain Lucas Chiappe à sa tête, s’oppose aux tronçonneuses pour sauver les forêts. C’est ainsi qu’est né le projet Lemu (« bois » en mapuche), mené, selon les autorités contrariées, par un groupe de « hippies de merde qui s’opposent au progrès ». Aux dernières nouvelles, ils n’ont d’ailleurs pas encore fini de s’y opposer*.

A lire et à relire pour apprendre puis ne pas oublier.

*http://bloglemu.blogspot.com/

Présentation par l’éditeur:

Qu’est-ce qui rapproche un pirate de la mer du Nord mort il y a 600 ans, un Argentin qui décide de sauver les forêts de Patagonie, un instituteur exilé qui rêve de son école et s’éveille avec de la craie sur les doigts, un Bengali qui aime les bateaux et les amène au chantier où ils sont détruits en leur racontant les beautés des mers qu’ils ont sillonnées ? Seulement cette frontière fragile qui sépare les héros de l’Histoire des inconnus dont les noms resteront dans l’ombre.

Voici, riche d’une humanité palpable, dans ce style sec et incisif auquel nous a habitués Luis Sepúlveda, toutes ces vies recueillies par un voyageur exceptionnel.

Evaluation :

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2 commentaires

  1. Je l’ai lu il y a longtemps, et j’en gardé peu de souvenirs, mais je sais que j’avais aimé…